Pauline Leclerc-Glorieux : “Stabilité, anticipation et conseil”

Pauline Leclerc-Glorieux est directrice générale de BNP Paribas Cardif.
Pauline Leclerc-Glorieux est directrice générale de BNP Paribas Cardif.

TRIBUNE – Pauline Leclerc-Glorieux, directrice générale de BNP Paribas Cardif, considère que les atouts des assureurs dans un monde incertain sont la stabilité, l’anticipation et le conseil. Cette tribune est publiée dans notre magazine sur le Bilan 2023 de l’assurance.

Si nous regardons par-dessus notre épaule, force est de constater que 2023 a été marquée par un contexte chahuté et plusieurs éléments forts. Tout d’abord, l’intensité des tensions géopolitiques aussi bien entre la Russie et l’Ukraine qu’au Moyen-Orient ou en Asie a des impacts significatifs en premier lieu sur les populations concernées mais au-delà sur l’ensemble de l’économie mondiale. De plus la détermination des banques centrales à lutter contre l’inflation s’est traduite par l’accélération des hausses de taux, laissant derrière nous une longue période de taux bas et même négatifs. Enfin, dans un monde où le dérèglement climatique est chaque jour un peu plus visible, la tendance de fond que sont les enjeux liés à l’ESG et la transition énergétique ont, l’année dernière encore, occupé le devant de la scène.

Face à ces enjeux, à ces défis collectifs, notre rôle en tant qu’assureurs est fondamentalement d’apporter une vision de long terme tout en gérant les questions de court terme. Cette approche unique, qui fait la force de notre métier, a permis à notre secteur de gérer à la fois la période de taux bas et sa sortie brutale. Les réserves constituées en régime de taux bas combinées à la diversification des supports au sein des contrats d’assurance-vie s’avèrent particulièrement adaptés pour aborder la période actuelle de taux plus élevés.

Faire face à l’incertitude

Cette anticipation nous permet maintenant de faire face à la période de transition que nous traversons. La hausse des rendements des fonds euros accompagne la hausse des taux de marché, qui conduisent à repositionner le fonds en euros au sein de l’assurance-vie en lui redonnant sa juste place : la prévisibilité de son rendement et la garantie en capital en font une brique indispensable au sein d’une allocation d’actifs diversifiée, brique complétée par une offre en unités de compte qui s’enrichit et se renforce avec le retour des produits structurés à la faveur de la hausse des taux et un intérêt constant des clients pour les « private assets ». L’intérêt des épargnants pour l’assurance-vie reste entier.

La hausse des rendements des fonds en euros mais aussi l’hétérogénéité des performances des différentes classes d’actifs des contrats en unités de compte viennent par ailleurs rappeler, si besoin était, l’importance de la diversification. Cette capacité à allier des allocations diversifiées au sein d’une même enveloppe selon les profils, les attentes et les évolutions des besoins de nos clients est la grande force de l’assurance-vie et le fondement de sa capacité à s’adapter aux circonstances de marché.

Vers une meilleure structuration du marché de la retraite

Autre défi majeur de 2023 en France, l’évolution du système des retraites, et les outils à notre disposition suite à loi Pacte de 2019, ont mis en lumière le rôle central des distributeurs dans le conseil apporté aux clients. En tant qu’assureurs, nous partageons un même enjeu : celui d’accompagner nos clients de la conscience d’un besoin, à la décision d’agir. Nous ne pouvons donc que nous réjouir de la création de ce marché unifié de la retraite, plus lisible. Ces évolutions font écho aux besoins exprimés par les Français de compléter les régimes de retraites obligatoires par des dispositifs d’épargne retraite dans un cadre fiscal stabilisé.

L’offre est encore en cours de structuration mais notons déjà que de grandes lignes de force se dessinent. Le cantonnement des actifs liés aux engagements retraite permet d’offrir une gestion d’actifs adaptée à un horizon d’investissement plus long que celui d’un fonds en euros classique avec notamment des proportions différentes de classes d’actifs – et de rendements. Cette structuration passe aussi par l’enrichissement des dispositifs de retraite collective qui, en réponse aux attentes des salariés, vont prendre une place de plus en plus prégnante dans les politiques RH des entreprises. Quant au marché de la retraite individuelle, il mérite la pleine attention de notre secteur pour proposer des offres et une distribution adaptées. Nous avons un réel rôle à jouer, collectivement, pour répondre aux besoins des clients en adoptant une approche patrimoniale globale.

Au-delà même de la conception des produits de retraite, cette capacité à penser à long terme et à faciliter la lisibilité des offres, est clé pour continuer à assurer notre métier dans les années à venir.

Défendre le droit au conseil

Les évolutions réglementaires, avec une actualité très riche en 2023, vont dans le même sens en se centrant sur les questions de protection des épargnants et d’ESG. Permettre aux épargnants de prendre des décisions éclairées, en améliorant l’information et la transparence, est absolument essentiel. Il s’agit de permettre aux assurés de faire des choix adaptés à leur situation personnelle et à leurs objectifs dans une acception large incluant la transition vers une économie plus durable.

L’enjeu est donc de participer à cette ambition tout en évitant les écueils que constitueraient une intensité de conseil insuffisante ou encore un excès d’informations difficiles à comprendre. Les évolutions réglementaires en cours, en particulier dans le cadre de la Retail Investment Strategy, doivent tenir compte de la nécessité de maintenir une approche de conseil au client inclusive. Nous devons ainsi nous assurer que tous nos clients puissent continuer à bénéficier d’un accompagnement pertinent et personnalisé, leur permettant de faire des choix éclairés y compris en matière d’ESG.

La situation de multi-crise que nous traversons depuis plusieurs années s’impose comme la nouvelle réalité. Il n’y aura pas de retour en arrière : c’est dans ce contexte que notre métier et qu’un produit comme l’assurance-vie prennent tout leur sens, par leur capacité à tirer profit d’environnements instables. En tant qu’assureurs, nous devons être certains de pouvoir honorer nos engagements de court terme tout en prenant les décisions qui nous permettront de continuer à être présents pour nos clients et nos distributeurs à long terme. Et les avancées de ces derniers mois, la capacité de notre secteur à s’emparer des grands enjeux sociaux, économiques et environnementaux, vont dans le bon sens.

Que pensez-vous du sujet ?