Comment Standard & Poor’s tient compte du risque de taux d’intérêt dans ses notations

Le niveau des taux d’intérêts influence de manière significative le bilan, la capacité bénéficiaire et en fin de compte la stratégie des assureurs. Nous accordons par conséquent une attention particulière à ces effets lors de notre analyse de leur profil de risque de crédit.

Tout d’abord, la pression induite par le niveau faible et persistant des taux d’intérêts impacte négativement le profil de risque opérationnel des assureurs vie et non-vie. Les revenus financiers sont des contributeurs clés au résultat dont la pérennité fait partie intégrante de notre analyse. Pour l’assurance non-vie nous percevons positivement un effort sur la rentabilité de la souscription via la tarification pour compenser un rendement d’investissement moindre. En assurance vie, des garanties modérées, un portefeuille d’activité favorisant les produits moins sensibles aux taux d’intérêts et une politique de partage des profits et pertes adéquate sont des caractéristiques favorables dans ce contexte de taux bas.

Nous analysons également les conséquences de l’exposition au risque de taux sur le profil de risque financier de l’assureur. L’adéquation du capital (Capital ajusté total / Capital requis) – combinée à nos prévisions de résultats – abouti à une évaluation prospective du niveau de fonds propres. La valeur de portefeuille des activités vie (Value of Business in Force, VIF) est une composante significative de notre capital ajusté total (Total Adjusted Capital, TAC). Cette mesure est sensible au niveau des taux et se voit altérée par leur baisse, détériorant ainsi le capital éligible. Par ailleurs, nous pouvons inclure dans notre TAC la provision pour participations aux excédents (PPE ou l’équivalent selon les zones géographiques) qui a vocation à soutenir les taux crédités à l’initiative de l’assureur. Néanmoins, le niveau actuel des taux d’intérêts peut impacter négativement la capacité des assureurs à constituer cette provision et ainsi détériorer leur ratio d’adéquation du capital. La pression continuelle sur les résultats d’investissement pourrait également ralentir la formation du capital via de moindres résultats non distribués.
Du côté du capital requis, une politique d’investissements en faveur d’actifs plus risqués (pour compenser la baisse des revenus d’intérêt) mène généralement à une exigence en capital plus élevée. Et de manière plus « directe », une charge explicite au titre du risque de taux lié au déséquilibre actif-passif est incluse dans notre calcul du capital requis.

Dans cet environnement défavorable, la résistance de la solidité financière des assureurs dépendra de l’efficacité des actions mises en places et la prudence avec laquelle ils gèrent leur capital ajusté au regard du capital requis.

Charlotte Chausserie-Laprée

Analyste Junior chez Standard & Poor’s Ratings Services.

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