Thierry Madic (Upemeic) : « Nous souhaitons réaffirmer notre position de syndicat »
INTERVIEW - Thierry Madic a été elu président de l'Upemeic en juillet dernier. Longtemps inactive, l'union professionnelle des experts d'assurés souhaite revenir dans le jeu de la vie syndicale.
Mise en sommeil, l'Upemeic a été « réactivée » au milieu des années 2000. Pour quelles raisons ?
Nous devions impérativement redéfinir les contours de la convention collective des experts d'assurés. Ce travail a été achevé en 2015. Nous souhaitons désormais réaffirmer notre position de syndicat, car nous représentons plus de 70% des effectifs et du chiffre d'affaires de la branche. Pour ce faire, nous reprenons contact avec les représentants du courtage, l'Amrae et la FFA.
Sur quels sujets en particulier ?
Une demande de la profession est de nous adapter aux risques nouveaux. Le cyber risk, par exemple, ne change pas fondamentalement le métier car il s'agit toujours de déterminer un montant de dommage. Le contexte est cependant différent de l’incendie ou du bris de machine, ce qui impose de nouvelles compétences dans les cabinets d'experts, concernant notamment la détermination des préjudices immatériels comme l'atteinte à la réputation et la prise en compte de coûts de redémarrage des systèmes d’information. Traditionnellement nos experts ont plutôt des profils d'ingénieur en bâtiment, d'économiste ou d'architecte. Il faut faire évoluer cela dans les mois à venir.
Vous avez été élu président de l'Upemeic en juin 2018. Quels sont les chantiers devant vous ?
Nous menons une réflexion sur l'expertise préalable. Elle a fait l'objet d'un travail de la part des membres de l'Upemeic qui a abouti à un référentiel CNPP en 2013. Il mérite un toilettage. Il y a des points d'amélioration possibles qui doivent répondre aux attentes de nos clients, des courtiers, et des agents en matière de souscription. Nous travaillons également sur le volet institutionnel pour tout ce qui concerne la branche. La convention collective a donc été revue, mais le chemin n'est pas terminé pour autant. Les pouvoirs publics poussent notamment à la concentration des conventions collectives. Nous sommes vigilants sur ce point.
Avec quelle convention pourriez-vous fusionner ?
Nos confrères de la FSE sont aujourd'hui représentatifs de la branche et suivent le dossier. Nous sommes en contact avec eux, mais pour le moment peu de détails filtrent sur les intentions des pouvoirs publics. Tout au plus nous savons que nous ne devrions pas être rattachés à la branche de l'expertise auto, comme cela fut un temps évoqué. Ce ne devrait pas non plus être celle de l'assurance.
18 mois après, quel bilan tirez-vous du passage d'Irma pour lequel les experts d'assurés ont été beaucoup sollicités ?
Nous avons été confrontés aux mêmes problématiques que les experts des compagnies. Il a fallu réagir vite pour organiser la logistique, notamment pour trier les dossiers qui méritaient l'intervention d'un expert d'assuré. La valeur ajoutée d'un cabinet est réelle pour les dossiers au-delà de 100.000 euros. Ce qui explique notre positionnement plus orienté sur les entreprises ou les copropriétés que sur les particuliers. Une autre difficulté dans ce genre de catastrophes est la présence de cabinets que je qualifierai d'éphémères et qui ne répondent pas toujours aux mêmes exigences que nous…
Combien de dossiers ont été traités par les experts ?
Nous n'avons pas consolidé les chiffres au niveau de l'Upemeic. Mais au sein du cabinet Galtier, cela représente plusieurs centaines de dossiers sur les 25.000 ouverts par les assureurs. Ce chiffre ne concerne que les dossiers pour lesquels nous avons donné suite. Nous avons par exemple reçu un sinistre à 2M d'euros concernant une villa pour laquelle la garantie était finalement limité contractuellement à hauteur de 600.000 euros. Dans pareil cas, cela n'a pas de sens de faire appel à un expert d'assurés.
Le mode de rémunération des experts a-t-il évolué ?
Ce n'est pas à l'ordre du jour. Pour les risques simples, nous restons sur un pourcentage que nous appliquons au montant des dommages estimés. Dans le cadre des polices d'assurance qui prennent en charge les honoraires des experts d'assurés, il s'établit en moyenne à 5% de l'indemnisation ou peut faire référence à un barème déterminé par la compagnie. Lorsque nous intervenons, nous essayons de faire généralement en sorte de ne pas dépasser ce montant. Pour les risques industriels, nous disposons d'un grille tarifaire étagée et dégressive. En ce qui concerne les dossiers plus longs, comme en responsabilité civile, nous pouvons avoir un régime dérogatoire. Nous nous approchons, dans ce cas, du modèle des avocats, avec la constitution d'une provision initiale qui nous permet de mettre en œuvre les premières expertises. Enfin, en expertise préalable, nous facturons à la journée.
Un temps supprimé des contrats d'assurance, les garanties prenant en charge les frais d'experts font-elles leur retour ?
En premier lieu, elle existe dans les anciens contrats qui sont toujours en cours et pour lesquels nous continuons d'avoir des missions. Certaines mutuelles et compagnies et certains contrats de bancassureurs proposent toujours cette garantie. Axa proposait d'activer dans certains de ses contrats sa garantie en cas de refus de l'indemnisation par l'assuré, ses nouveaux contrats les proposent maintenant de manière optionnelle. Dans d'autres compagnies, les frais d'experts font partie d'un package incluant par exemple les frais de relogement. Mais les contrats évoluent très vite.
À voir aussi
SPVie : "Nous nous sommes refinancés à hauteur de 50M d'euros"
Éric Chancy : "L’UMR multiplie ses partenariats externes"