Les réassureurs pourraient-ils essuyer une nouvelle succession de catastrophes ?

CHRONIQUE – Les dommages assurés causés par les ouragans Harvey, Irma et Maria de 2017 se chiffrent à près de 138 milliards de dollars (*); 20% de ce montant sont pris en charge par les 20 plus grands réassureurs mondiaux.

Si l’on en croit divers travaux de modélisation, la sinistralité observée en 2017 correspond à un scenario qui se produirait une fois tous les vingt-cinq ans (1/25). Or, avec les années 2005 et 2011, c’est la troisième fois qu’une succession de tels évènements se produit au cours de la même année en moins de 20 ans. Il n’est donc pas improbable que les assureurs subissent des pertes dépassant 100 milliards de dollars plus fréquemment que l’industrie ne le prévoyait généralement jusqu’alors.

Lors des derniers renouvellements de polices, nous n’avons pas observé d’augmentation significative d’appétit pour le risque de la part des réassureurs dans leur ensemble. De fait, l’exposition aux risques catastrophiques n’a que légèrement augmenté et représente 31% des capitaux propres en janvier 2018, contre 30% l’année précédente. Par ailleurs, un tiers des réassureurs a réduit de plus de 10% l’exposition à un scénario de catastrophes naturelles de probabilité 1/250 ans. Cependant, si un tel scénario extrême survenait, 8 des 20 premiers réassureurs mondiaux ne maintiendraient probablement pas un niveau de fonds propres ajustés en adéquation avec notre niveau de confiance «AA» ce qui pourrait, toutes choses égales par ailleurs, entraîner des abaissements de notations.

En 2018, les 20 premiers réassureurs ont budgété 11 milliards de dollars au titre de la couverture de sinistres liés aux catastrophes naturelles. Si ce budget n’est pas dépassé, les réassureurs devraient enregistrer des bénéfices avant impôts d’environ 21 milliards de dollars selon nos projections. Le capital disponible pour absorber les pertes générées par les catastrophes de 2018 s’élève donc à 32 milliards de dollars avant que les fonds propres ne soient impactés. Ainsi, une sinistralité de probabilité 1/10 ans évaluée à 21 milliards de dollars impacterait certes les profits des réassureurs mais non leurs fonds propres. Ce ne serait en revanche pas le cas si ces mêmes 20 réassureurs enregistraient des pertes supérieures à 35 milliards de dollars, ce qui correspond selon nous à un scenario dont la période de retour se situe aux environs de 1/50 ans.

Enfin, si les réassureurs subissaient des pertes équivalentes à celle de 2017, les bénéfices et les provisions constituées durant l’année 2018 seraient probablement réduits à un niveau proche de zéro.

Aurelie Salmon, Analyste Crédit
(*) d’après Swiss Re Sigma

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