Chronique : Le déficit de protection assurantielle mis au jour par la COVID-19

Une nouvelle version du projet d'accord interministériel sur la prévoyance est sur la table.
Une nouvelle version du projet d'accord interministériel sur la prévoyance est sur la table.

La propagation de la COVID-19 a mis en lumière un phénomène peu connu du grand public qui est le déficit de protection assurantielle, c’est à dire l’écart entre le risque total et la portion des risques assurés pour une branche définie.

Ce phénomène global touche aussi bien les pays en développement que les économies développées où le taux de pénétration de l’assurance (prime d’assurance en pourcentage du PIB) est généralement élevé.

En juin 2020, le Fonds monétaire international a estimé les pertes économiques mondiales liées à la COVID-19 à environ 12 trillions de dollars sur 2020-2021, tandis que Munich Re estimait les pertes économiques assurées à un montant situé entre 30 et 107 milliards de dollars pour 2020. De plus, S&P Global Ratings prédisait une baisse de 2.5% du PIB mondial en 2020.

Le déficit de protection assurantielle lié à la pandémie met en évidence d’autres déficits. En effet, depuis maintenant quelques années, la croissance de la richesse de la classe moyenne a dépassé celle du taux de pénétration assurantielle. De cela résulte un déficit de protection assurantielle dans les branches de l’assurance vie, santé, cyber et des catastrophes naturelles.

L’un des déficits de protection assurantielle le plus étudié est celui associé aux risques de catastrophe naturelle. À mesure que les températures augmentent avec le changement climatique, nous nous attendons à ce que le nombre d’événements météorologiques extrêmes augmente dans certaines régions du globe. Nos recherches montrent que les 20 pays les plus vulnérables aux catastrophes climatiques sont des pays émergents où le taux de pénétration assurantielle moyen est plus de deux fois inférieur à la moyenne mondiale.
Rares sont les gouvernements de pays en développement qui ont mis en œuvre des initiatives pour garantir le financement qui aiderait le redressement et la reconstruction après une catastrophe naturelle. La tendance est à la réaction une fois l’évènement survenu, par la vente d’actifs, la réaffectation des postes budgétaires ou la recherche d’une aide ou de prêts internationaux.

Cette approche réactive présente plusieurs inconvénients. Dans de nombreux cas, les fonds levés s’avèrent insuffisants pour faire face aux dégâts. Toutefois, ce processus est souvent mené en période de stress, et souvent sans vision à long terme. Plusieurs études ont montré que le résultat d’un tel manque de préparation aux chocs se fait sentir à la fois au niveau individuel et au niveau national. Pour les particuliers, cela se manifeste par une baisse de leur niveau de vie; pour les pays, de leurs perspectives économiques à long terme.

Les gouvernements pourraient atténuer les conséquences des évènements climatiques en utilisant des outils tels que l’aménagement du territoire, le développement des infrastructures, les systèmes d’alerte précoce et l’amélioration de la capacité d’adaptation des populations résidentes (par exemple, en sensibilisant davantage aux mesures d’adaptation prises lors des inondations). A titre d’illustration, le Bangladesh utilise un système d’alerte précoce pour les crues soudaines et les orages.

Le secteur de l’assurance, et plus particulièrement les réassureurs, pourraient également être l’un des leviers utilisés par les pays pour renforcer de manière proactive leur résilience aux chocs financiers liés aux catastrophes naturelles (et aux pandémies). Un tel partenariat profiterait vraisemblablement aux deux parties en renforçant les capacités nationales de reprise après une catastrophe tout en augmentant les revenus de son secteur de l’assurance. Pour les réassureurs, cela augmenterait la diversification géographique, ce qui serait positif pour les notations du secteur.

Olivier Karusisi
Directeur délégué

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