Cédric Charpentier : “La rétention est un levier indiscutable d’optimisation du coût global des risques”

INTERVIEW – A l’occasion de cette édition 2021 de l’Amrae, Cédric Charpentier, directeur général de Siaci Corporate and Specialty (Siaci Saint Honoré) revient sur la période de renouvellements 2021 et sur les perspectives de développement du courtier en dommages. 

Comment se sont passés les renouvellements 2021 en IARDT pour Siaci Saint Honoré ?

La crise que nous vivons depuis 12 mois rend la période inédite en IARDT. D’abord, cette situation est globale car elle impacte l’ensemble des assureurs et réassureurs du marché, et ce dans le monde entier.

Ensuite, elle entraîne des positions radicales de la part des porteurs de risques, avec des mouvements tarifaires forts et des restrictions de couvertures, qui ne concernent pas seulement le risque pandémie. Sur ce point, nos équipes ont été particulièrement vigilantes pour que les modifications des contrats ne soient pas excessives.

Nous faisons également face à une crise capacitaire, notamment en dommages ou sur les lignes financières, avec certains acteurs qui se sont retirés de marchés et d’autres qui ont réduit leurs expositions sur certaines lignes. Cette situation est problématique car les parts d’apérition se sont réduites, obligeant les courtiers à compléter les placements auprès d’un plus grand nombre d’assureurs.

Enfin, cette situation s’inscrit dans la durée et, alors que nous pensions qu’elle avait atteint son paroxysme lors des renouvellements de 2020, nous nous attendons à une poursuite d’un marché sous tensions encore en 2021.

Loin de subir cette situation, nos équipes ont déployé tout leur savoir-faire. nous avons anticipé efficacement cette « crise de l’offre » et avons déterminé avec nos clients les meilleures options qui s’offraient à eux.

Beaucoup d’assureurs se sont retrouvés débordés face à cette situation. Comment avez-vous géré cela ?

En effet, nous avons constaté des renégociations plus nombreuses et des temps de traitement des dossiers allongés. Les délais de réponse des assureurs s’en sont considérablement ressentis.

Ce mouvement a été amplifié par des chaînes de décision plus complexes chez les assureurs et des pouvoirs de souscription locaux plus limités. In fine, de nombreuses décisions ont fait l’objet de validations venues des sièges des compagnies, parfois à l’étranger, avec des délais rallongés.

Dans ce contexte, le rôle du courtier prend tout son sens. Nous avons anticipé ces difficultés et avons étroitement travaillé avec nos clients à leur fournir des options, par l’approche de marchés alternatifs par exemple, ou l’étude de montages incluant des rétentions plus élevées, pour défendre au mieux leurs intérêts.

Est-il facile de continuer à conquérir des parts de marché dans ce contexte ?

Facile n’est pas le mot que j’emploierais dans un contexte tendu comme nous venons de l’évoquer. Cependant, le modèle de Siaci Saint Honoré en tant qu’acteur de proximité avec une implantation mondiale, nous permet de nous positionner solidement pour tous les appels d’offres, qu’ils soient en France ou à l’étranger.

En France, notre politique est de poursuivre notre développement sur des segments cibles auprès des entreprises du CAC40, du SBF120 mais également des ETI. Nous souhaitons également continuer notre progression à l’international, notamment grâce à la combinaison d’une croissance organique et de potentielles acquisitions principalement sur nos lignes de spécialités.

Justement, quelles sont vos velléités en matière d’acquisitions ?

Sur ce point, nous restons sur un rythme assez soutenu en IARDT, avec les acquisitions de cabinets de courtage internationaux tels que Cambiaso Risso et Driesassur en 2019 et Sogecore en 2020. Ces opérations sont de vrais succès dans le développement de l’entreprise et notre volonté est de continuer à croître sur nos lignes de spécialités comme le Marine ou encore la Construction. Nous serons donc opportunistes si les occasions se présentent.

Quelles ont été les lignes les plus affectées ces derniers mois ?

Hormis les quelques exceptions comme l’automobile ou les multirisques environnement, relativement épargnés, la quasi-totalité des activités IARDT ont été affectées par la crise de l’offre. Les lignes Dommages, RC Générale ou RC Dirigeants ont été particulièrement touchées, notamment par la réduction de capacité disponible.

Concernant l’activité Cyber, la hausse généralisée de la demande couplée à l’explosion de la sinistralité a fait grimper en flèche les tarifs et rendu le marché extrêmement frileux. Les attaques qui ont touché certaines grandes entreprises en cours d’année, avec des sinistres d’intensité à plus de 30M d’euros, ont fortement impacté le marché qui enregistrait fin 2020 un ratio S/P estimé à plus de 120%.

Face aux difficultés de certains assureurs, quelles sont les solutions qui s’offrent à vous ?

Notre statut de cabinet international nous permet de chercher des solutions partout dans le monde. En 2020, cette tendance s’est accélérée avec des placements finalisés grâce à des acteurs présents sur les marchés périphériques – comme à Londres ou aux États-Unis.

Ensuite, nous encourageons nos clients à se doter d’une stratégie d’optimisation de rétention et ce afin de minimiser l’impact des coûts de transfert des risques au marché traditionnel, via création de captives d’assurance par exemple. La rétention est un levier indiscutable d’optimisation du coût global des risques. Siaci Saint Honoré s’est doté des meilleures expertises dans ce domaine avec notre filiale 2RS leader européen en gestion de captives.

Comment anticipez-vous l’exercice 2021 ?

Les répercussions économiques de la crise ne sont pas neutres puisque nos revenus sont liés aux bonnes performances de nos clients. Toutefois, nous adressons une typologie de comptes de grandes et moyennes entreprises qui ont pour l’heure moins souffert comparé à des entreprises de taille plus modeste.

Nous avons engagé en 2020 une transformation profonde de notre organisation et nous nous sommes dotés d’un plan stratégique de développement à 5 ans. Ces efforts portent déjà leurs fruits et nous permettent d’aborder 2021 avec confiance et détermination. La campagne de renouvellement qui s’achève a été intense mais s’est bien passée.

Nous constatons en France mais aussi au plan mondial un taux de rétention de nos clients très solide mais également l’acquisition de nouveaux clients prestigieux. Ainsi, en 2020, notre chiffre d’affaires IARDT s’affichera en croissance par rapport à 2019.

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