Véronique Perottino : “Il n’y aura pas de relance sans assureurs engagés !”

Véronique Perottino, directrice général d MS Amlin en France.
Véronique Perottino, directrice général d MS Amlin en France.

[Tribune] Pour News Assurances Pro, Véronique Perottino, directrice générale de MS Amlin en France dresse le bilan de l’assurance des grands risques en 2020 et se projette sur 2021.

L’année 2020 aura été l’année de tous les challenges ! Dès le début d’année, nous avons vu une véritable tendance à la hausse des prix, très marquée sur les grands comptes, ce dans toutes les lignes, les grands acteurs du marché réduisant leurs engagements et regardant scrupuleusement les garanties accordées. Mais ce qui marquera l’année 2020, professionnellement et personnellement pour l’ensemble d’entre nous, sera la pandémie de la Covid-19 et ses rebondissements, enrichissant notre vocabulaire : coronavirus, gestes barrières, confinement, déconfinement, reconfinement…

Malgré la découverte d’une situation inédite à partir de mars 2020, y compris pour les pouvoirs publics, la profession a fait preuve de résilience, démontrant son aptitude à basculer en télétravail dans l’instant et à mettre en place des mesures accommodantes pour les entreprises assurées. Les Plans de Continuité d’Activité ont particulièrement bien fonctionné et l’engagement des collaborateurs n’a pas fléchi avec le travail à distance.

La fermeture imposée pour juguler l’impact de la Covid-19 a provoqué un séisme économique sans précédent, chez nos assurés en premier lieu mais avec de lourdes répercussions également chez les assureurs. En effet, de l’ampleur de la crise économique subie par les entreprises, le grand public ne retiendra pas l’aide apportée mais plutôt l’impossibilité de la profession devant des risques systémiques. L’essence même de notre métier qui permet la possibilité d’entreprendre, qui n’existe que parce que les assureurs mutualisent les risques et reversent une indemnisation sur la base d’un aléa pour des risques auxquels les entreprises ne sauraient faire face, n’est pas comprise par nos assurés. Un long travail de communication reste à faire !

L’événement a également mis en lumière des rédactions de polices peu claires pour les assurés et pas toujours interprétées dans l’esprit de la conclusion du contrat. Par voie de conséquence, la charge de travail pour tous, y compris les courtiers aura été et est toujours phénoménale et l’ensemble des assureurs aura été impacté par les provisions liées aux déclarations de sinistres ou des litiges Covid-19.

Ajoutons à cela des marchés financiers extrêmement volatiles. Dans un contexte de résultats techniques impactés par les réclamations liées à ces sinistres, de cette première crise d’ampleur survenant sous un cadre réglementaire renforcé (Solvabilité 2 – IFRS 17), les assureurs pilotent leur position financière et donc leur solvabilité avec les courbes d’intérêts et un resserrement de leurs politiques de souscription.

Que ce soit chez les courtiers, les clients ou les assureurs, l’ensemble des équipes est resté mobilisé. Je salue notre capacité collective à faire face à nos engagements et remercie tous nos collaborateurs d’avoir été des acteurs engagés face aux épreuves imposées par cette crise.

2021 promet d’être une année riche de nouveaux défis pour notre secteur. Les difficultés éprouvées par les entreprises sont réelles aujourd’hui et se feront sentir dans les prochains mois, avec un rebond important des faillites pour les plus fragiles d’entre elles. Le risque de récession aura des conséquences en premier lieu chez nos assurés, mais aussi chez les assureurs, entre autres sur la collecte des primes 2021. Et les renouvellements tendus de fin d’année, notamment sur les grands risques, imposeront à tous les assureurs de partir à la reconquête de leurs clients durement éprouvés, souvent animés envers eux d’un sentiment fort de manque d’écoute. En 2021, les assureurs devront renforcer les échanges !

En parallèle, le marché bougera encore. L’ère des rachats n’est pas finie. Chez les assureurs, l’annonce de la vente d’Aviva en France avec quelques repreneurs potentiels comme Macif et Allianz, encore sur les rangs à ce jour, a surpris. Plus récemment, c’est RSA qui a accepté une proposition de rachat par les groupes canadien Intact Financial et danois Tryg. Et dans le courtage, la fusion-absorption des entités de Willis par AON représentera certainement l’impact le plus important pour notre marché, tant chez les clients, les assureurs que leurs concurrents. Cela créera-t-il des opportunités pour leurs confrères qui redessinent depuis l’annonce leurs stratégies pour un positionnement adapté ? ou cela révèlera-t-il les ambitions de futurs entrants sur le marché français tel que l’affiche le groupe britannique Hyperion ? ou encore cela donnera-t-il au nouvel ensemble une puissance de frappe dominatrice par la combinaison des forces de ces deux poids lourds sur notre marché hexagonal ? Ceci sans compter les rapprochements supputés. Le courtage français ne semblant pas en reste de projets d’envergure avec les discussions énoncées entre Siaci et le groupe Burrus. Oui, il va sans dire que l’année 2021 devrait nous permettre de connaître de grands rebondissements.

Cette crise aura également mis en lumière l’importance des valeurs des entreprises et du sens qu’elles donnent au collectif qu’elles représentent. La dimension managériale a pris tout son sens en s’adaptant sans délai à une organisation totalement différente. A la lumière de ces 12 derniers mois, la manière dont l’entreprise s’engage en matière de responsabilité sociale et environnementale et le traduit dans sa stratégie opérationnelle, la bienveillance et guidance qu’elle propose à ses collaborateurs, sont désormais des éléments incontournables à appliquer et valoriser dans l’entreprise. Et ce seront sans nul doute des facteurs clés de succès pour faire adhérer les collaborateurs et générer l’engagement nécessaire à la relance de notre pays en 2021.

Par Véronique Perottino

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