Recrutement / Docu : La gueule de l’emploi pour entrer chez Gan

Le documentariste Didier Cros, de Zadig Productions, s’est invité lors de deux journées de recrutement par un cabinet pour Gan Assurances et met en exergue ce qu’il appelle « la comédie du travail ».

La diffusion sur France 2 de La Gueule de l’emploi a ému la presse. Si pour certains ce documentaire met en évidence des méthodes douteuses employées par les recruteurs du cabinet RST, entre pressions exercées sur les candidats et abus d’autorité de la part de « petits chefs », pour d’autres il reflète surtout la réalité du monde du travail actuel.

La polémique a engendré la mise en place d’un site www.lagueuledelemploi.net qui fournissait les coordonnées des participants et dénonçait le contenu du documentaire. Désormais supprimé il a malgré tout laissé des traces.

« Je voulais faire un film sur les entretiens d’embauche. J’ai rencontré beaucoup de cabinets de recrutement : celui que j’ai choisi était intéressant car il correspond à une dynamique moyenne. Beaucoup ont des méthodes beaucoup plus rudes », explique Didier Cros, contacté par News Assurances qui ajoute que ce cabinet n’est pas « discriminant », contrairement à d’autres. Aucune volonté de « stigmatiser une entreprise » ajoute-t-il.

Le recrutement sans CV

De son côté, Gan Assurances qui ne s’attendait pas à des telles réactions médiatiques et qui ne souhaite pas s’exprimer directement a déclaré sur son site comprendre l’émotion suscitée par les images dont le rendu est « choquant », ajoutant « nous sommes nous-mêmes profondément blessés par leur teneur » et « regrettons cette situation ». L’assureur déclare également avoir accédé à la demande du réalisateur afin de mettre en avant la démarche de recrutement « sans CV », effectuée sur deux jours à la demande de Didier Cros.

Le documentaire montre 10 femme et hommes au chômage, confrontés au cours de sessions d’entretiens collectifs. Face à un « jury », ils doivent se distinguer. Particularité, les candidats ne savent pas exactement pour quel poste ils postulent, sinon qu’il s’agit d’un emploi de commercial. Les recruteurs n’ont pas non plus consulté les CV et se basent sur le comportement. Une méthode qui justifie aussi les pressions et remises en causes, par toujours fondées sur les compétences mais sur la personnalité.

« La comédie du travail »

La méthode participe également à la dramatisation du documentaire, puisque tout se joue sur le comportement des postulants. « Il ne faut pas oublier que ça n’est qu’une comédie, cruelle certes, mais la comédie du travail » poursuit Didier Cros. Le recruteur assume le rôle du superviseur, parfois provocateur, à côté des candidats qui se mettent dans la peau du postulant idéal. « C’est violent. Mais ce qui est très surprenant, c’est que beaucoup de gens ont l’air de découvrir ce qui est une réalité quotidienne et participe au monde du travail » ajoute le réalisateur.

Dans la veine des films du réel, pas de commentaire de la part du documentariste. Les candidats en revanche passent tour à tour face caméra et livrent leur ressenti, au sujet des autres candidats et des recruteurs. Les clashs sont passés au crible, mettant en exergue la personnalité de chacun des candidats qui deviennent les personnages de scènes qui prennent des allures de jeu de télé-réalité. Il y a Hervé le rebelle, Julie qui se plie au jeu, Gérard l’ancien, Frédéric le stressé, Kévin le râleur… Et les méchants.

La course… au Smic

C’est lorsqu’ils ne sont plus que trois que les candidats apprennent qu’ils ont concouru pour un poste au Smic. « La rémunération dans les compagnies d’assurance, c’est toujours un peu particulier » expose la déléguée régionale de Gan, avant qu’un autre recruteur précise que s’y ajoutent des « commissions déplafonnées », soit « un taux de commissionnement fixé en fonction de la nature des contrats ».

« L’entreprise nous flatte »

« C’est vrai qu’à ce moment-là quand on a cette information, on est pas mal déçu » reconnaît Georges. « On se dit j’ai fait tout ça, j’ai réussi tout ça, pour avoir le Smic » renchérit Julie. La méthode de sélection, ou « tri sélectif » est une recette à base de jus de pression dans lequel marinent longtemps les candidats, relevé d’abus d’autorité parfois trop pimentés et réussi finalement sa cuisson parce « l’entreprise, après avoir passé autant de tests, épuisé nos ressources en matière de stress, de réactivité, pour nous avoir tout de même sélectionnés quelque part elle nous valorise. Elle nous flatte », dira Julie, l’une des candidates.

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