Des tarifs santé en forte hausse dans un contexte d’incertitude

    Les tarifs des complémentaires santé pourraient augmenter jusqu’à 10% en 2012, du fait de la hausse des dépenses de santé et des taxes sur les contrats.

    S’il existe une certitude pour 2012, c’est que les tarifs des complémentaires santé vont augmenter. Et de beaucoup. Aujourd’hui, les complémentaires prennent en charge entre 13 et 14% des dépenses de santé. Une part qui n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Entre 2004 et 2010, 8,2Mds d’euros de dépenses de santé ont été transférées du régime obligatoire au complémentaire.

    Parmi les acteurs acceptant de se prononcer, les estimations diffèrent. En octobre, la Mutualité française prévoyait une hausse minimum de 4,7% des tarifs 2012. Mais certains anticipent déjà des chiffres plus importants. Chez Axa, qui n’applique les majorations qu’en avril 2012, on table sur une hausse de 5,5 à 6,6%, TSCA incluse. « Mais nous essaierons de limiter au maximum les majorations », assure David Dorn, directeur du marché santé prévoyance et dépendance pour les particuliers.

    Du côté de Santiane.fr, Daniel Makanda, directeur marketing et communication, va plus loin et anticipe une hausse des tarifs 6 à 8% implémentée par les compagnies. Avec la taxe, on grimpe jusqu’à 10 ou 11% de hausse pour les consommateurs, des chiffres confirmés par plusieurs autres sources. « Nous devons faire face à une augmentation croissante des coûts, explique Henri Laurent, directeur général prévoyance et santé chez Swiss Life. Les prestations ont augmenté de 7 à 8%, ce qui est énorme alors que la Sécurité sociale se félicite de la maîtrise des coûts dont une partie est due à un transfert de charges vers l’assurance complémentaire.  La hausse de tarifs sera donc malheureusement forte. »

    La hausse des dépenses de santé

    Parmi les postes à examiner pour expliquer cette évolution, il y a en premier lieu la hausse des dépenses de santé. Une hausse naturelle, due au vieillissement de la population et aux épidémies. « Nous attendons la fin du trimestre avec des phénomènes de saisonnalité comme la grippe pour donner un chiffre », explique Philippe Dabat, directeur général délégué d’AG2R La Mondiale.

    Il faut aussi prendre en compte une hausse que l’on qualifiera d’économique, liée à l’augmentation des dépassements d’honoraires. Selon la Mutualité française, ces derniers ont progressé de 5,5% par an en euros constants entre 1990 et 2006. Ce qui en fait l’un des postes de dépenses des mutuelles connaissant la plus forte augmentation.  Les mesures du PLFSS 2012 permettent elles aussi d’estimer la hausse des dépenses de santé, entre 2 et 3% selon David Dorn, chez Axa.

    Viennent ensuite les taxes. Le passage de la TSCA à 7% pour les contrats responsables et solidaires n’a toujours pas été digéré par les différents acteurs. Ce qui donne au total des complémentaires santé taxées à hauteur de 13,27%. « Depuis 2008, le produit de la taxation est passé de 720M d’euros à 4,3Mds d’euros, et son taux de 2,5% à 13,27% » explique la Mutualité Française dans un communiqué. Il se murmure même que la taxe sur les contrats non solidaires et non responsables pourrait passer de 9 à 10%.

    Manque de visibilité

     « Le plus gros problème c’est que nous n’avons pas de visibilité : on ne sait pas ce que sera notre métier dans 6 mois, regrette Henri Laurent de Swiss Life. Davantage de règlementation, pourquoi pas, mais il faut définir des règles du jeu stables. Il est difficile de construire une stratégie dans un environnement flou. »

    Seule la GMF a affirmé qu’elle ne répercuterait pas la hausse de la taxe sur ses tarifs, tout en reconnaissant qu’il s’agit d’une opération marketing puisqu’elle gère seulement  25. 000 assurés en santé. « Il n’y aura aucune répercussion sur nos tarifs en 2012 car, du fait de notre portefeuille de petite taille, nous n’avons pas un rapport sinistres à primes trop élevé », déclarait Patrice Forget, directeur général délégué de la GMF, à News Assurances Pro fin septembre.

    Ajouter à ces chiffres le phénomène de résiliation des contrats : « Le système des comparateurs non courtiers encourage à changer plus souvent d’assureur, reconnait Daniel Makanda de Santiane.fr. Or une offre n’est rentable pour un assureur que s’il garde son client plusieurs années. Les compagnies  pourraient tout à fait répercuter sur les primes les coûts d’acquisition supplémentaires liés au fait que les assurés changent plus souvent de contrat.»

    Eviter la désassurance

    Un turn over des contrats alimenté par l’opportunisme de certains distributeurs, qui profitent des offres de renouvellement pour faire changer de contrats à leurs clients. Si les assureurs ne se plaignent pas haut et fort de ce phénomène, certains reconnaissent pourtant le subir.

    A terme, l’enjeu est grand : éviter la désassurance des Français. « On peut se demander si des assurés intelligents trouveront normal de payer un contrat dont la charge fiscale peut aller jusqu’au tiers de son montant pour certaines catégories, comme les retraités ou les salariés sans mutuelle d’entreprise qui ne peuvent déduire leurs cotisations santé de leurs impôts », estime Claire Bodin, membre du collège des économistes de la santé. D’où la nécessité de réfléchir à l’accès aux soins, et peut-être à une nouvelle manière de s’assurer.

    « Nous devons continuer à donner des garanties de qualité à prix acceptable, tout en évitant la sortie par le bas », explique Philippe Dabat d’AG2R La Mondiale. Tout comme la Mutualité française, il insiste sur la redéfinition de la répartition des rôles entre assurance maladie et complémentaires santé : « Nous ne devons pas rester des payeurs aveugles. »

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