Dépenses de santé : l’audioprothèse, problème de santé et de concurrence

    Plusieurs millions de Français sont atteints d’une déficience auditive, mais moins d’un sur trois est équipé, rappelait en février l’Autorité de la concurrence. Une cause du sous-équipement ? Le prix : 1550 euros et un reste à charge de 1100 euros en moyenne pour une audioprothèse. En règle générale, deux appareils pour une personne, âgée de 69 ans : il faut deux mois de la retraite moyenne pour s’équiper.

    La prise en charge par l’assurance maladie obligatoire en matière d’audioprothèse est faible (120 euros par audioprothèse, contre 785 euros en Allemagne, 666 euros en Belgique et 600 euros en Italie selon l’Autorité de la concurrence), et l’intérêt des pouvoirs publics pour le sujet aussi. Seule implication récente des pouvoirs publics, le relèvement du numérus clausus, de 150 à 199 professionnels par an, ce qui fait dire à Marianne Binst, directeur général de Santéclair : « Les pouvoirs publics doivent comprendre que les sujets liés à l’audioprothèse n’est pas un problème d’audioprothésistes, mais de malentendants ».

    Les complémentaires et leurs réseaux se penchent d’ailleurs depuis plusieurs années sur ce marché, du point de vue du patient. Cet intérêt ne faiblit pas alors que l’audioprothèse pourrait devenir un sujet de différenciation sur le marché de l’assurance santé individuelle : les seniors, les plus concernés, constituent désormais une très grande part dudit marché.

    « L’audioprothésiste est à la fois juge et partie. Le patient arrive avec une prescription d’appareillage pour une ou deux oreilles, et c’est tout. A l’audioprothésiste de déterminer l’équipement nécessaire, qu’il va vendre. La tentation est forte de sur équiper en technologie et donc en prix », souligne Jean-François Tripodi, directeur général de Carte Blanche Partenaires.

    Sur ce marché oligopolistique où six fabricants se partagent 90 % du marché en France, les appareils coûtent de 250 euros en entrée de gamme à 450 euros en haut de gamme en moyenne, indique l’Autorité de la concurrence. Le patient paie donc autre chose.
    « Le métier d’audioprothésiste est un cas unique, où le professionnel facture et encaisse le coût de sa prestation sur les quatre ou cinq ans à venir, puisque la loi dit que la vente de l’appareil est indissociable du service », explique Marianne Binst.

    « L’audition évoluant, le patient paye au départ l’équipement, et la prestation de suivi pour les années qui viennent. Ce suivi est primordial pour une bonne audition », décrypte Jean-François Tripodi, qui poursuit : « malheureusement, certains audioprothésistes ne rappellent pas leurs patients et n’effectuent pas la prestation payée au départ. Chez Carte Blanche, nous allons mettre en place un suivi de cette prestation dès l’année prochaine ».

    En tout cas, pour l’instant, audioprothésiste est une bonne orientation, puisque le salaire moyen brut s’établit à 4.500 euros par mois en moyenne, largement au-dessus des professions paramédicales d’un niveau de formation équivalent (opticiens, masseurs-kinésithérapeutes, infirmiers), relève dans un bilan d’étape l’Autorité de la concurrence, qui vient de clore sa consultation publique.

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