Chronique : Bilan et perspectives des assureurs européens à mi-année 2023

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Le drapeau de l'Union Européenne.

Le secteur de l’assurance est confronté à de nombreux défis liés à la fragilité de la croissance économique, à l’inflation et au nouvel environnement de taux d’intérêt.

L’ensemble de ces effets se matérialise graduellement dans les résultats des assureurs, mais nous considérons que cela n’aura pas d’incidence sur nos notations.,En effet, la solidité du bilan des assureurs, leur profil de liquidité et l’augmentation des taux de réinvestissement contrebalancent ces obstacles. Le rating moyen des assureurs de la zone EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique) à fin juillet 2023 se situe en catégorie ‘A‘. Le secteur se situe au rang de premier de la classe dans la mesure où le rating moyen à la même période pour les institutions financières ou le secteur de l’immobilier est plus proche de la catégorie ‘BBB’, et même ‘BB’ pour les secteurs aéronautique et défense et enfin ‘B’ pour celui des médias ou du tourisme.

L’excédent de fonds propres constitue un atout majeur pour les assureurs de la région EMEA. En 2022, ces excédents ont été principalement érodés par la chute de la valeur des investissements, notamment celle des obligations. Cependant, nous nous attendons à ce que les pertes non réalisées sur ces investissements soient ramenées à leur valeur nominale au fil du temps – plus rapidement pour les assureurs non-vie que pour les assureurs-vie.

Nous pensons que les assureurs non-vie continueront d’afficher des performances solides, comme c’est le cas depuis la fin de la crise COVID. Malgré une croissance modérée de la matière assurable, la plupart des assureurs non-vie que nous notons ont réussi à augmenter leurs tarifs pour compenser l’inflation. Les réassureurs ont indirectement bénéficié de ce contexte d’augmentation des taux de primes par les assureurs primaires et affichent de belles performances lors du renouvellement des polices avec des augmentations moyennes à deux chiffres.

Nous estimons toutefois que le renchérissement du coût de la réassurance pourrait symétriquement affaiblir les résultats des assureurs primaires. Par ailleurs, nous observons que le renforcement des réserves pour refléter l’inflation est relativement contenu à ce stade. En effet, seul un environnement inflationniste plus marqué pourrait accroître la nécessité de renforcer les réserves de manière significative.

Pour leur part, les assureurs vie sont confrontés à la concurrence des banques qui proposent des taux de rémunération de l’épargne plus attractifs. Cette situation peut nuire aux nouvelles affaires mais ne devrait pas affecter de manière significative les portefeuilles existants car les rachats de produits d’assurance-vie s’accompagnent souvent de pénalités. Par ailleurs, les avantages fiscaux et les participations différées, qui ne sont disponibles qu’à l’échéance du contrat, limitent également l’appétit pour les rachats.

Les assureurs vie que nous notons en zone EMEA affichent pour la plupart des niveaux de liquidité suffisants pour faire face à l’environnement actuel, mais nous continuons toutefois à surveiller de près leurs positions respectives. Nous restons également prudents quant aux investissements moins liquides, notamment dans l’immobilier, les dettes privées et le capital-investissement, qui pourraient faire face à des dépréciations au cours de la période 2023-2025. Toutefois, en raison des caractéristiques de partage des profits et pertes des contrats d’assurance-vie avec participation, une partie des éventuelles dévalorisations serait logiquement supportées par les assurés.

Enfin, nous continuons d’être attentifs à d’autres facteurs externes de risque portant sur les perturbations accrues liées au changement climatique, à la multiplication des cyberattaques notamment en raison des tensions géopolitiques et à la transformation digitale croissante. Nous considérons ces risques comme élevés avec une tendance à la dégradation.

Par Marc-Philippe Juilliard, Directeur
S&P Global Ratings

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