Captives : Le casse-tête des activités dites "financières"
Plusieurs industriels tricolores peinent ces derniers mois à créer leurs captives de réassurance. En cause, certaines de leurs entités ou activités considérées par le régulateur comme « financières », véritable casse-tête mathématique.
Le développement de captives de réassurance à la française maintient son rythme dans l’Hexagone. Entre la création d’Alstom Réassurance, de Pluxee Re et de Bel Re ou encore les agréments de CDA Reinsurance et Orange Réassurance ces quatre derniers mois, l’engouement autour de cet outil ne se dément pas pour les industriels tricolore.
Toutefois, certaines entreprises peinent encore à installer leurs véhicules en France. En cause, certaines de leurs entités ou activités considérée aux yeux de l’ACPR comme « financières ».
« Il est important de reclarifier ce que peuvent faire ou non les sociétés dites financières aux yeux du code des assurances. Elles ont tout à fait le droit de créer une captive de réassurance en France, à la nuance près que cette structure ne pourra pas bénéficier de la déduction fiscale permise par la constitution de la provision pour résilience, rappelle Eleonora Sorribes, avocate associée au sein du cabinet LPA-CGR Avocats. Ces sociétés sont donc en droit de s’interroger sur l’intérêt de créer ou non leur structure en France si une trop grande partie de leur activité relève de la finance ».
Parmi ces sociétés financières, on retrouve par exemple les compagnies d’assurance ou les banques tricolores qui font ainsi le choix du Luxembourg pour leurs captives. À l’image de Société Générale qui a immatriculé son véhicule « SGL Re » au Grand-Duché début 2024, ou encore la Macif en pleine réflexion sur le sujet.
Lâcher l’hybride ?
Pour les entreprises dont une partie seulement des activités est financière, ce statut hybride n’est donc pas sans poser de problème. « Toute la difficulté réside dans l’interprétation de l’activité de la société par l’ACPR qui peut avoir une lecture subjective », fait valoir un apériteur du marché.
« Certains groupes souhaitant créer en France une captive de réassurance ont en leur sein des entités financières pour lesquelles l’ACPR est très attentive. Cette question a notamment été soulevée dans le cas d’Assuraposte Ré (puisque le groupe La Poste possède en son sein La Banque Postale et CNP Assurances), ou encore d’Orange Réassurance », précise pour sa part Julie de Saint Leger, la directrice générale de 2RS France.
Selon plusieurs sources, la Française des Jeux ferait également partie des groupes tricolores aujourd’hui en pleine réflexion pour la création d’une captive de réassurance. Mais le géant national du jeu de hasard serait lui aussi dans ce cas de figure, la FDJ ayant lancé au printemps dernier ses propres services bancaires.
Questions de calcul
Car la difficulté ne réside pas tant du côté de l’ACPR que dans le calcul mathématique que ces entreprises doivent opérer. Sur ce point, l’autorité est très claire. La quote-part des primes provenant des entités financières d’un groupe dans les programmes captivés doit être exclue du calcul de la provision pour résilience.
« En d’autres termes, le gendarme applique stricto-sensu le code des assurances. Ainsi, toute entreprise dont l’objet social n’est ni une banque ni une compagnie d’assurance peut créer sa captive de réassurance en France. Cette dernière peut prétendre à la PPR modulo ses entités dites financières, précise Julie de Saint Leger. In fine, même si ces calculs peuvent paraître contraignants, les montants exclus du calcul de la PPR ne sont pas de nature à remettre en cause l’intérêt du projet de création de captive ».
Pour ces industriels aux activités hybrides, reste la possibilité pour leurs réassureurs maison de constituer des provisions techniques assurantielles, dont la provision d’égalisation pour certains risques (risques naturels, risques atomiques, risques de RC dus à la pollution, risques spatiaux, risques liés aux attentats, au terrorisme, au transport aérien et dernièrement aux risques cyber). « Cela reste intéressant, notamment pour se constituer une trésorerie dédiée et initier en interne une démarche de prévention des risques », conclut notre apériteur.
À ce jour, 7 captives de réassurance attendent toujours leur agrément de la part du gendarme (voir notre tableau ci-dessous).
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