Sécurité sociale : plus de 30 milliards d’exonérations en 2008

Les exonérations de cotisations de sécurité sociale, qui bénéficient principalement aux employeurs, ont encore augmenté en 2008 à 30,7 milliards d’euros, environ autant que le déficit record prévu pour la Sécu en 2010, selon des chiffres publiés lundi par l’Acoss.

L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) fédère le réseau des Urssaf chargé de la collecte des cotisations en proportion de la feuille de salaire et servant à financer les retraites et dépenses maladies.

Ces exonérations sont compensées par l’Etat, mais pas à 100%. En 2008, l’Etat s’est montré moins mauvais payeur que d’habitude, il a versé environ 92% de son dû à l’Acoss et il manquait à l’appel 260 millions d’euros.

Le montant des exonérations de cotisations sociales ne cesse d’augmenter depuis les années 1990 et a plus que doublé entre 1999 et 2007. En 2008, il a augmenté de 13,1% (après +13,5% en 2007, +13,6% en 2006, +4,6% en 2005).

L’employeur est notamment exonéré de cotisations patronales de Sécurité sociale sur les bas salaires, de manière dégressive jusqu’à 1,6 Smic.

Depuis juillet 2007, l’exonération est totale au niveau du Smic pour les entreprises de moins de 20 salariés, ce qui, reprochent les syndicats, incitent les employeurs à ne pas payer plus leurs salariés.

Au fil des ans, la liste des exonérations s’allonge: sur l’apprentissage, l’emploi à domicile, les contrats aidés, les zones franches urbaines, et depuis octobre 2007 sur les heures supplémentaires, puis en 2008 sur le rachat de jours RTT.

Avec la crise, le gouvernement en a ajouté de nouvelles, notamment pour les entreprises de moins de 10 salariés (dispositif “zéro charge”) et plusieurs personnalités de premier plan de la majorité UMP ne cachent plus leur volonté de faire basculer le financement de la protection sociale sur les impôts, au nom de l’allègement des coûts du travail.

“L’individualisation non, la fiscalisation oui”, a lancé Henri Guaino, le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, lors d’un colloque le 8 décembre.

Raymond Soubie, l’influent conseiller social de l’Elysée, a lui aussi évoqué “des politiques structurelles” pour pérenniser notre système social.

En 2008, les exonérations ont représenté 21,3% des cotisations patronales du secteur privé, selon l’Acoss, et sur les 30,7 milliards d’euros d’exonérations, 28,5 mds ont bénéficié aux entreprises.

L’évolution globale de 13,1% des cotisations exonérées en 2008 s’explique “principalement”, note l’Acoss, par la montée en charge des exonérations relatives aux heures supplémentaires (2,8 mds EUR) et au rachat de jours RTT (73 M EUR).

De plus, le dispositif +Fillon+ (21,4 mds EUR) est “resté dynamique” en 2008, selon l’Acoss.

Les deux-tiers des exonérations sur les heures supplémentaires (le salarié touche le brut au lieu du net, plus une majoration de 25%) repartent dans la poche des quelques 4 millions de salariés qui font des heures sup’.

En juillet, l’Elysée avait accepté le principe de débattre “sans tabou” de ces allègements de cotisations patronales, sévèrement critiqués par la Cour des compte en août 2006 sceptique sur leurs effets sur l’emploi, et dont les syndicats réclament qu’ils soient assortis de contreparties.

Mais le gouvernement s’est empressé de mettre en avant le chiffre de 800.000 emplois qui seraient détruits si l’on supprimait tous ces allègements.

A partir de 2010, les entreprises n’ouvrant pas la négociation salariale annuelle, en principe obligatoire, s’exposent à une réduction de 10% de leurs exonérations. La loi ne les oblige pas à conclure la négociation.

Paris, 20 déc 2009 (AFP)

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