Le marché de l’assurance emprunteur bascule sûrement… mais lentement

Après la santé collective, l’assurance emprunteur est devenu le marché sur lequel se positionnent assureurs et courtiers. La promesse de marges intéressantes et une réglementation de plus en plus favorable à la déliaison vont dynamiser un segment largement aux mains des banques.

Loi Chatel, loi Lagarde, loi bancaire, loi Hamon, amendement Bourquin… en dix ans, la législation sur l’assurance emprunteur s’est épaissie suivant trois objectifs principaux : plus de protection pour le consommateur, plus de transparence et plus de concurrence pour le marché.

Sur le premier point les progrès sont là, selon Patrick Burtin, directeur assurance emprunteur et directeur marketing chez April Santé Prévoyance. « Grâce aux exigences imposées par l’équivalence bancaire, nous commercialisons de plus en plus de contrats avec les options complètes », affirme-t-il.

En matière de transparence, le compte n’y est pas encore. Au mois de juin dernier, l’ACPR se fendait d’une recommandation. Elle y déplorait l’existence de « freins dans la mise en œuvre du droit au libre choix du contrat d’assurance emprunteur. Il apparaît, en effet, que l’information délivrée à la clientèle sur les conditions permettant de faire usage de ce droit était souvent insuffisante et que certaines modalités de traitement des demandes d’assurance externe pouvaient ralentir les démarches des demandeurs voire limiter l’exercice de leur droit ».

Gare aux excès d’optimisme

« Il y a clairement un non respect des délais imposés par la législation », nous confie un assureur. En cas de demande de délégation, la banque doit en effet fournir une réponse à son client dans les 10 jours. « Dans les faits nous sommes plutôt autour des deux mois », poursuit cette même source.
Cet obstacle nuit ainsi au troisième objectif poursuivi par l’empilement de réglementations, à savoir dynamiser la concurrence. Les seuls chiffres disponibles montrent que 15% des assurances de prêt immobilier sont souscrites en délégation. « Cette part a peu bougé ces quatre dernières années. Le volume de cotisations a en revanche augmenté ce qui a mécaniquement fait grimper le niveau de cotisations acquis aux délégataires », explique Patrick Burtin.

Ce chiffre de 15% ne permet pourtant pas d’analyser réellement l’impact des différentes législations. Il est en effet calculé sur le stock. Or jusqu’à aujourd’hui, seules les affaires nouvelles de moins d’un an étaient concernées par la déliaison. La deuxième brique de l’amendement Bourquin pourrait donc changer la donne. Ce dernier prévoit en effet la mise en œuvre de la résiliation annuelle sur l’ensemble du stock à compter du 1er janvier 2018.

Mais gare aux excès d’optimisme. « Il n’y aura pas de grand soir de l’assurance emprunteur », avertit Patrick Burtin. « L’assurance emprunteur va devenir extrêmement concurrentielle, selon Patricia Lacoste, directrice générale du groupe Prévoir. Le marché va bouger, tout le monde s’adaptera, les banques également ». Ces dernières préparent des actions défensives. Dans un contexte de taux d’emprunt immobilier bas, elles réalisent en effet une partie conséquente de leur marge sur l’assurance de prêt.

Elles disposent donc toutes de solutions d’assurance individuelle à proposer à leur clients qui souhaiteraient sortir des contrats groupes. En dernier recours, elles ont également la possibilité de proposer des offres d’assurance par des courtiers partenaires sur lesquelles elles perçoivent une commission. C’est le cas de BPCE avec CBP Solutions.
La concurrence exacerbée pourrait par ailleurs entamer le chiffre d’affaires sur ce segment. « Si les clients changent d’assurance, c’est avant tout pour payer moins cher », indique le directeur assurance emprunteur d’April. Les 6,5 milliards d’euros de cotisations engrangés en 2016 se contracteraient à la faveur d’une guerre des prix. Un plus petit gâteau avec plus d’acteurs autour de la table en somme.

Car les appétits s’aiguisent à la vue de la libéralisation de ce marché réputé rentable. Le groupe Prévoir en a fait une priorité pour 2018. Swiss Life France a lancé son offre fin 2016. Allianz France a dévoilé une plateforme de souscription digitale en début d’année, tout comme Société Générale Insurance. Sans oublier les courtiers tels que April ou Zen’up qui comptent également surfer sur la vague.

Tout le monde se prépare à passer la nouvelle année 2018 avec une offre ou des outils renouvelés sur l’emprunteur. Pourtant, tous les assurés ne basculeront pas. Le tarif est particulièrement sensible aux critères d’âge, à l’état de santé du souscripteur et à la durée du contrat restante. Certains clients ne trouveront pas d’intérêt à changer d’assureur.
Certains travaillent d’ailleurs à affiner les profils de clients. « Il faut se préparer à faire face à un afflux de demandes dont beaucoup n’aboutiront pas sur la souscription d’un contrat. Nous devons être en mesure de détecter le plus en amont possible ces devis. Sans quoi nous travaillerons pour rien », estime un courtier.

Un coût de souscription élevé

Dernier point de nature a refroidir les ardeurs de certains, l’explosion des coûts d’acquisition et de souscription. La réglementation existe, encore faut-il que le client le sache. La fin de l’année devrait donc voir se multiplier des communications publicitaires incitant le chaland à quitter sa banque, gonflant les budgets marketing.

Démarcher un client déjà sous contrat coûte en outre beaucoup plus cher que créer une affaire nouvelle. « Il faut vérifier l’équivalence des garanties, gérer la résiliation, ou encore calculer au plus juste la date d’effet. Trop tôt et le client paie deux fois son assurance. Trop tard et nous créons un trou de garantie », détaille Patrick Burtin.
De là à penser que le jeu n’en vaut pas la chandelle, il n’y a qu’un pas qu’aucun acteur ne devrait franchir.

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