Contrats non-réglés : « Une lente décrue » selon la Cour des Comptes
Dans son rapport annuel, la Cour des Comptes livre un bilan de la loi dite « Eckert » relative aux contrats d'assurance-vie en déshérence. Si elle souligne que la réforme est bien engagée, elle constate également une lente décrue des encours.
La Cour des Comptes dresse le bilan de la loi « Eckert », en vigueur depuis le 1er janvier 2016. Cette dernière prévoyait une mise en conformité des acteurs dans un délai de 18 mois suivant sa promulgation. « La Cour a constaté que les chantiers ont été menés à bien dans les délais requis », indique les magistrats dans leur rapport.
Plus de 50M d'euros d'investissement pour CNP
Pour illustrer son propos, la Cour des Comptes s'appuie sur l'exemple de CNP Assurances, lourdement sanctionné en 2014. Le bancassureur aurait ainsi investi 42,6M d'euros entre 2014 et 2017 et environ 11,5M d'euros en 2018 pour sa mise en conformité.
Par ailleurs, les magistrats de la rue Cambon soulignent que la consultation, au mois une fois par an, du Registre national d'identification des personnes physiques (RNIPP) a largement contribué à accélérer la recherche des contrats non-réglés. Quelque 152.140 dossiers ont été identifiés en 2015, 65.205 en 2016 et 55.360 en 2017.
Entre 27% et 47% des stocks réglés selon les assureurs
Les assureurs ont ainsi versé 2,2Mds d'euros aux bénéficiaires de contrats non-réglés en 2016 et 2Mds d'€ en 2017. Pour autant, « la situation est inégale selon les entreprises. Sur les dix assureurs les plus importants du marché français, le taux de règlement en 2017 des contrats en stock à fin 2016 variait de 27% à 47% ».
Les sommes restant à régler demeurent donc à un niveau élevé. Selon la Cour des Comptes, l'encours à la fin de l'année 2017 s'est établi à 4,7Mds d'euros, soit à peine 700M d'euros de moins que les encours estimés au 31 décembre 2015. « Le stock des contrats d'assurance vie non réglés décroît lentement, de 6 à 7% par an », détaille le rapport. Plusieurs raisons expliquent cette tendance. En premier lieu, de nombreux dossiers sont classés sans suite faute de bénéficiaire identifié. Mais le délai de 10 ans avant le transfert à la Caisse des Dépôts maintient le stock en sommeil chez les assureurs à un niveau élevé. Par ailleurs, les flux entrants dus aux nouveaux décès viennent en partie compenser le règlement des contrats déjà effectués par les assureurs.
Des points à améliorer dans le traitement des dossiers
Le système demeure toutefois perfectible selon la Cour des Comptes. Elle estime ainsi que le site Ciclade censé centraliser la recherche des avoirs en déshérence souffre de « lacunes ». Certaines demandes doivent être faites par courrier. Certains produits d'épargne salariale sont traités sur un autre site. La recherche s'effectue, en outre, seulement par le nom de l'assuré. Elle ne fonctionne pas à partir des informations des bénéficiaires. Enfin, les délais de traitement sont encore longs : 5,3 mois.
Du côté des assureurs plusieurs chantiers cruciaux sont sur la table. Tout d'abord, un accord doit être signé, dans le courant du premier semestre 2019, entre la Direction générale des finances publiques (DGFiP) et l'Association pour la gestion des informations sur le risque en assurance (Agira). Il doit permettre aux assureurs d'obtenir les coordonnées des bénéficiaires de contrats non-réglés de la part de l'administration fiscale.
A l'assaut des 13,3Mds non réglés de la retraite supplémentaire
Mais surtout, selon la Cour des Comptes, les assureurs pourraient obtenir l'autorisation d'interroger le NIR (le numéro de Sécurité sociale). C'est une demande du secteur depuis plusieurs années. C'était impossible jusqu'à l'entrée en vigueur du RGPD qui prévoit « un encadrement par décret en Conseil d’État des conditions d’utilisation du NIR par les banques et les assureurs, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l’informatique et des libertés », précise le rapport de la Cour des Comptes.
Il reste toutefois un dossier épineux à régler. Celui des contrats en rente. La loi Eckert ne traite en effet que des contrats avec un terme. Or les contrats de retraite supplémentaire sont sans terme et prévoient pour la plupart une sortie en rente. « Ces caractéristiques ont deux effets : d’une part, ils ne font pas l’objet de recherche de bénéficiaires; d’autre part, si le décès n’est pas connu de l’assureur, la créance n’est jamais éteinte et les fonds correspondants ne sont pas transférés à la Caisse des dépôts », indique le rapport de la Cour.
L'enjeu est de taille. Selon l'ACPR, le niveau de rentes non liquidées après l'âge légal de départ à la retraite s'élèverait à quelque 13,3Mds d'euros.
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