Réglementation : Et si Solvabilité II entrait en vigueur en mode “dégradé” ?

L’arrivée de Solvabilité II en tant que telle reste soumise à de nombreuses questions. La première est de savoir ce qu’il sera finalement décidé sur le pilier I. Si, depuis quelques mois, l’idée d’activer la réforme via les piliers II et III avait fait son chemin, les nouveautés proposées par EIOPA au terme du test des branches longues (LTGA) pourraient modifier la donne.

Dans le jeu politique qui anime la mise en place de Solvabilité II, le temps s’est raccourci et chaque mois qui passe enferme la réforme dans une voie sans issue. Le problème du trilogue vient des élections européennes de 2014. Et pour que les députés européens sortent “la tête haute” de ce projet, ils doivent trouver une solution. EIOPA leur a fourni de la matière pour y parvenir. Notamment parce que le superviseur européen a donné toutes les cartes pour une application de Solvabilité 2 en “phase dégradée” selon Marie-Laure Dreyfuss, qui dirige le pôle Gouvernance et Contrôle interne chez Actuaris.

Solvabiltié II pourrait passer avec une phase 1 dégradée. La réforme n’est pas complètement ‘compliant’ mais cette phase permet de mettre en œuvre la réforme” dans sa totalité, c’est à dire avec les trois piliers, précise Marie-Laure Dreyfuss, également auteur d’un ouvrage pour sur le pilier 3 de la réforme*.
De fait, les propositions d’EIOPA correspondent à cette hypothèse : la mesure transitoire a été simplifiée par rapport à ce qu’elle était dans le dernier test, et une deuxième mesure a été proposée sur les calculs des provisions techniques. Ces deux changements ouvrent la voie à un passage de Solvabilité II dans le délai prévu, à condition que le trilogue parvienne à trouver un accord pour Omnibus 2 dans le dernier trimestre.

Dans les mesures contra-cycliques proposées par EIOPA, il est fait mention de mesures transitoires. Celles-ci, appliquées sur une durée de 7 ans, devraient permettre aux différents acteurs de présenter un SCR inférieur à 100% mais de le corriger par la suite, sur les exercices suivants. L’important étant de contrecarrer la volatilité, le ratio Solvabilité I serait encore utilisé avec les exigences de capital en Solvabilité II. L’organisme aurait alors la possibilité de lisser cette volatilité dans le temps, sur une période de 7 ans selon les préconisations de l’EIOPA. Une mesure qui revient à créer un “tunnel” autour du fameux seuil des 100% de SCR, “avec une prise en compte des durées d’engagement” prévient Bertrand Boivin-Champeaux, directeur prévoyance et retraite supplémentaire au CTIP.

De son côté, la FFSA avait prévenu que la clause de transition “devait tenir compte des évolutions futures des taux d’intérêts“, impliquant de fait un rallongement de la durée de lissage. La FFSA, dans sa lettre commune avec le GDV, son homologue allemand, avait également demandé à ce que la stransition soit “compatible avec les principes de Solvabilité II” c’est à dire que “la transition devrait porter sur la courbe des taux d’actualisation, et ne pas constituer un élément ad hoc des fonds propres”.

Reste maintenant aux trilogues, qui sont actuellement en “trilogues techniques” sur le redresseur de volatilité, à s’entendre pour qu’au début de l’année 2016, comme l’EIOPA l’avait prévu, Solvabilité II soit effective.

* “Maîtriser le reporting sous Solvabiltié 2” L’Argus Editions, 115 pages dans sa version avec couverture Actuaris

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