Réforme santé / Etats-Unis : vive opposition des assureurs avant un vote important au Congrès

Barack Obama voit se dresser le secteur de l’assurance devant la réforme du système de santé américain, obstacle familier mais redoutable au moment où le grand projet politique de sa présidence est soumis mardi au Congrès à un vote important.

La résistance de ce lobby très puissant, le même qui avait contribué à l’échec cuisant de l’effort de réforme de Bill Clinton dans les années 90, était prévisible. Mais elle se manifeste à un moment décisif. La commission des finances du Sénat doit procéder mardi au vote très attendu sur une proposition de loi visant à étendre la couverture médicale à des dizaines de millions d’Américains qui n’en ont pas et à enrayer une vertigineuse escalade des dépenses.

Il y aurait encore loin entre un feu vert de la commission et une adoption définitive par le Congrès. Mais un vote favorable pourrait préfigurer, entre la majorité démocrate de M. Obama et l’opposition républicaine, le compromis que la Maison Blanche juge indispensable au succès d’une entreprise aussi périlleuse politiquement.

Que M. Obama prédomine là où ses prédécesseurs ont échoué depuis des décennies et il enregistrera le grand succès que ses adversaires l’ont défié de présenter quand il s’est vu décerner le prix Nobel de la paix. Qu’il échoue et il aura dilapidé une grande part du capital politique nécessaire à d’autres réformes, quelques mois avant les élections parlementaires de 2010.

L’échec de la réforme de la santé de M. Clinton et de son épouse avait fortement contribué en 1994 à une reprise historique du Congrès par les républicains. A l’époque déjà, les assureurs qui vendent leur couverture médicale aux Américains avaient joué un rôle déterminant.

Or, au moment où l’administration Obama, après un été difficile, voulait croire qu’elle avait repris le dessus dans la vive querelle en cours sur la santé, le lobby de l’assurance vient fournir aux républicains des arguments qui risquent de porter.

Un rapport commandé par une association de plusieurs centaines d’assureurs, America’s Health Insurance Plans, affirme que si le texte sur lequel se prononcera la commission sénatoriale des finances mardi devenait loi, une famille américaine paierait en 2019 en moyenne 4.000 dollars de plus pour sa couverture médicale que si la loi ne changeait pas.

La proposition soumise au vote mardi n’est que l’un des projets versés au débat. Quatre autres commissions (trois à la Chambre des représentants, une autre au Sénat) ont déjà voté leur propre version et il faudra, au bout du compte, forger un compromis pour faire adopter la réforme avant fin 2009, selon le voeu de M. Obama.

Mais le texte de la commission des finances du Sénat est central dans une controverse qui divise démocrates et républicains, mais aussi les démocrates entre eux, et la Chambre et le Sénat. Il est en effet censé maintenir la cohésion des démocrates et rallier assez de républicains modérés pour passer.

Il coupe aussi l’un des angles d’attaque des républicains qui, en dehors de taxer M. Obama de “socialisation” de la médecine, l’accusent de mener le pays au gouffre financier. La proposition de la commission des finances réduirait le déficit budgétaire de 81 milliards de dollars sur 10 ans, selon une analyse d’un office parlementaire publié la semaine passée.

Aussi la Maison Blanche a-t-elle répliqué avec virulence aux assureurs. “Il s’agit là d’une analyse ne servant que les intérêts du monde de l’assurance, l’un des principaux adversaires de la réforme de la santé”, a dit un porte-parole, Reid Cherlin, “elle sort à la veille d’un vote qui signifie une diminution de leurs bénéfices. Il est difficile de la prendre au sérieux”.

Washington, 12 oct 2009 (AFP)

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