Recommandation relative aux placements des organismes d’assurance en période de crise financière

    Dans le contexte actuel de la crise financière et des évolutions récentes enregistrées par les règles comptables internationales et américaines (en particulier l’amendement publié le 13 octobre 2008 modifiant la norme IAS39 et la norme IFRS7 sur les modalités de reclassement des actifs financiers), les collèges du Conseil national de la comptabilité (CNC) et de l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) ont souhaité que des réflexions soient menées afin d’identifier si ces évolutions nécessitaient que la réglementation comptable française soit précisée.

    Au terme des réflexions qui ont été conduites et qui intéressent les organismes régies par le Code des assurances, le Code de la sécurité sociale et le Code de la mutualité, le Conseil national de la comptabilité et l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles ont adopté la présente recommandation conjointe qui rappelle les dispositions actuellement en vigueur selon les règles comptables françaises et qui apporte les clarifications suivantes pour l’arrêté
    des comptes de ces organismes d’assurance au 31 décembre 2008 sur :

    – Les modalités de dépréciation des placements des organismes d’assurance dans les comptes individuels et dans les comptes consolidés ou combinés de ces entités établis selon les règles françaises.
    – Les informations à communiquer en annexe sur les valeurs de réalisation dans les comptes individuels et dans les comptes consolidés ou combinés de ces organismes établis selon les règles françaises.

    1- Modalités de dépréciation des placements des organismes d’assurance dans les comptes individuels et dans les comptes consolidés ou combinés de ces entités établis selon les règles françaises

    1.1 Placements relevant de l’article R332-192 du Code des assurances :

    Le Code des assurances dispose que les valeurs amortissables réglementées relevant de l’article R.332-19 “ne font pas l’objet d’une provision” mais qu’elles doivent néanmoins être dépréciées à l’inventaire ” lorsqu’il y a lieu de considérer que le débiteur ne sera pas en mesure de respecter ses engagements, soit pour le paiement des intérêts, soit pour le remboursement du principal.”

    Le CNC et l’ACAM rappellent que l’avis N° 2006-07 du CNC du 30 juin 2006 relatif aux dépréciations des titres relevant de l’article R.332-19 du Code des assurances précise :
    – des critères généraux, observables, pouvant servir de base aux analyses multicritères permettant de déterminer s’il existe un risque avéré de contrepartie,
    – les modalités d’évaluation de la dépréciation telle que définie par le Code des assurances.
    Un risque de contrepartie est considéré comme avéré “dès lors qu’il est probable que l’organisme d’assurance ne percevra pas tout ou partie des sommes qui lui sont dues au titre des engagements souscrits par la contrepartie ” (Deuxième alinéa de l’avis N° 2006-07).

    Le CNC et l’ACAM précisent que la notion de risque de contrepartie avéré ne doit pas être confondue avec une simple possibilité de défaillance de la contrepartie sur les engagements qu’elle a souscrits qui ne fait que caractériser une perte potentielle et non probable. Ce principe, est du reste, en cohérence avec les articles 2 et 3 du règlement CRC 2002-03 modifié par les règlements n° 2005-03 et n° 2007-06 qui précisent la notion de risque de crédit avéré pour les établissements de crédit.

    Par ailleurs, le CNC et l’ACAM soulignent qu’en ce qui concerne la mise en œuvre de cette démarche d’identification de risque avéré de contrepartie, les documentations réalisées par les organismes afin de justifier les analyses menées devraient refléter les éléments connus de manière contemporaine à l’arrêté des comptes et étayant les décisions et conclusions prises en matière de dépréciation.

    1.2 Placements relevant de l’article R332-203 du Code des assurances :

    Le Code des assurances dispose que pour les titres relevant de l’article R.332-20, les dépréciations estimées à l’inventaire ” ne peuvent être constatées que lorsqu’il y a lieu de considérer qu’elles ont un caractère durable”.
    L’avis N° 2002-F du Comité d’urgence du 18 décembre 2002 relatif aux provisions pour dépréciation à caractère durable des organismes d’assurance précise :
    – l’approche multicritères permettant de qualifier les présomptions de dépréciation durable,
    – les modalités d’évaluation de la dépréciation à caractère durable,
    – les exigences en termes de documentation des critères retenus.

    Dans le contexte actuel des marchés, le CNC et l’ACAM apportent les précisions suivantes :

    – Les considérants de l’avis N° 2002-F, précisent que dans le cadre de l’analyse multicritère menée, le critère de présomption de dépréciation à caractère durable relatif au “niveau de moins value latente significative peut être défini pour les actions françaises, en fonction de la volatilité constatée, soit 20 % de la valeur comptable lorsque les marchés sont peu volatils, ce critère étant porté à 30 % lorsque les marchés sont volatils”.

    Le CNC et l’ACAM considèrent que la situation actuelle de forte volatilité des marchés permet, pour les comptes clos au 31 décembre 2008, de porter le critère de présomption de dépréciation à caractère durable à 30 % de moins value latente des placements en actions françaises et, sauf cas particuliers, également européennes. Il rappelle que, conformément à l’avis précité, pour les autres titres, ce critère devra être adapté aux caractéristiques des placements concernés.

    Il est rappelé que, au-delà de cette présomption, la connaissance d’informations spécifiques caractérisant la possibilité d’une dépréciation durable de certaines lignes peut également conduire à procéder à la détermination d’un horizon de détention et d’une valeur recouvrable, quand bien même ces lignes n’atteignent pas les seuils précités.

    – En cas de cession de placement à une date antérieure à l’horizon de détention initialement envisagé dégageant une moins value nette de provision significative la documentation mentionnée dans l’avis précité est jugé “satisfaisante” si elle permet d’apprécier et d’analyser dans quelle mesure les évolutions des facteurs endogènes ou exogènes conduisent à remettre en cause les hypothèses et intentions retenues dans la documentation initiale de l’horizon de détention envisagé par l’entreprise.

    La qualité de la documentation initiale permettra donc, en rendant possible la rationalisation du changement d’intention et l’identification plus précise des
    hypothèses que ce changement remet en cause, de mieux cerner l’ampleur des conséquences à tirer, conformément à l’avis précité, d’un tel changement.
    En particulier, la prise en compte dans la détermination de l’horizon de détention et de la valeur recouvrable, d’une rotation envisagée du portefeuille auquel la valeur étudiée appartient, doit conduire à apprécier les conséquences de la cession d’une ligne en deçà de son horizon de détention prévue par rapport à la remise en cause que cette cession matérialise dans la rotation envisagée.

    – Il est également rappelé que l’impossibilité de documenter la recouvrabilité ou l’incapacité de prendre un engagement d’horizon de détention – ou la volonté de ne pas prendre un tel engagement – doivent en principe conduire à tirer des conséquences immédiates de l’existence de moins-values latentes.

    2- Informations à communiquer en annexe sur les valeurs de réalisation des placements des organismes d’assurance dans les comptes individuels et dans les comptes consolidés ou combinés de ces entités établis selon les règles françaises

    Le Code des assurances dispose dans son annexe de l’article A 344-34 que l’annexe des états financiers “est constituée de toutes les informations d’importance significative permettant d’avoir une juste appréciation du patrimoine et de la situation financière de l’entreprise, des risques qu’elle assume et de ses résultats”. A ce titre, les organismes d’assurance doivent notamment mentionner dans l’annexe des états financiers :
    – ” les modes et méthodes d’évaluation appliquées aux différents postes du bilan, du compte de résultat et de l’annexe …”,
    – un état récapitulatif des placements mentionnant notamment la valeur de réalisation de ces placements dont les modalités de calcul sont précisément définies et fixées par l’article R332-20-15 en fonction de la nature des placements :
    – “a) les valeurs mobilières cotées et les titres cotés de toute nature sont retenus pour le dernier cours coté au jour de l’inventaire,
    – b) les titres non cotés sont retenus pour leur valeur vénale correspondant au prix qui en serait obtenu dans les conditions normales de marché et en fonction de leur utilité pour l’entreprise,
    – c) les actions de sociétés d’investissement à capital variable et les parts de fonds communs de placement sont retenues pour le dernier prix de rachat publié au jour de l’inventaire …”

    Dans le contexte actuel des marchés, le CNC et l’ACAM soulignent qu’il est nécessaire qu’une information au moins qualitative soit donnée dans l’annexe des états financiers :

    – sur la définition des valeurs de réalisation utilisées conformément aux méthodes fixées
    par le Code des assurances,
    – sur les hypothèses retenues,
    – et sur les incertitudes éventuelles qui peuvent résulter du fait que les valeurs de réalisations mentionnées, conformément aux dispositions prévues par le Code des assurances, sur la base des dernières cotations ou sur la base des derniers prix de rachat publiés peuvent s’écarter sensiblement des prix auxquels seraient effectivement réalisées les transactions si ces actifs en portefeuille devaient être cédés.

    1 Dans la présente recommandation, les organismes d’assurance désignent les organismes relevant du Code des assurances, du Code de la mutualité, et du Code de la sécurité sociale. Les références aux textes sont celles du Code des assurances, qu’il convient de transposer par analogie aux Codes de la mutualité et de la sécurité sociale.
    2 R931-10-40 du Code de la sécurité sociale, R212-52 du Code de la mutualité
    3 R931-10-41 du Code de la sécurité sociale, R212-53 du Code de la mutualité
    4 A 931-11-11 du Code de la sécurité sociale, Art 4.5 du Règlement CRC n° 2002-06 pour les mutuelles relevant du Code de la mutualité
    5 R 931-10-42 du Code de la sécurité sociale, R212-54 du Code de la mutualité

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