Les transporteurs maritimes voient exploser leur prime d’assurance

La piraterie dans le Golfe d’Aden, voie obligée pour passer de la Méditerranée à l’Océan indien via le Canal de Suez, coûte de plus en plus cher, à cause des rançons mais aussi de l’explosion des primes d’assurance et des moyens mobilisés pour repousser les attaques, comme l’a souligné un colloque international à Nantes.

Pour 2008, le coût des rançons lié à la piraterie dans le monde est estimé entre 15 millions et plus de 100 millions d’euros, chiffres forcément approximatifs car rares sont ceux qui dévoilent le montant réel des rançons ou même admettent en verser, selon les experts réunis jeudi et vendredi pour le 3e Colloque international sur la sûreté maritime et portuaire.

L’industrie maritime doit aussi compter avec “la perte commerciale représentée par l’immobilisation du navire et le surcoût des éventuels détournements de route”, relève Laurent Gally, spécialiste de sûreté maritime à l’Ecole nationale de la Marine marchande (ENMM) de Nantes.

Au premier semestre 2009, un total de 240 attaques de pirates ont été enregistrées sur les mers du monde contre 114 sur la même période l’an dernier, selon le Centre international de Kuala Lumpur -International maritime bureau’s piracy reporting center.

L’OTAN estime aujourd’hui entre 1.000 et 1.500 le nombre de pirates agissant au large de la Somalie, pays qui a sombré depuis 1991 dans la guerre civile. Et le climat d’insécurité a fait s’envoler les assurances : les primes réclamées par les assureurs pour traverser le golfe d’Aden sont “multipliés par quatre ou cinq par rapport à la prime habituelle car c’est assimilé à une zone de guerre”, relève Pierre Beurier, professeur du centre de droit maritime et océanique de l’Université de Nantes.

A chaque trajet, la seule prime de guerre représente entre 10.000 et 20.000 dollars supplémentaires par navire selon les données publiées à Nantes, un montant qu’il faut ajouter à la taxe de passage obligatoire pour le Canal de Suez, en moyenne 400.000 euros.

Malgré tout plus de 20.000 navires choisissent cette route où les risques d’attaques sont omniprésents, au point que certains font appel à des services de protection privée pour se prémunir.

Des armateurs choisissent donc de contourner le continent africain, explique Patrick Rondeau, responsable de la sécurité de l’organisation professionnelle Armateurs de France. Mais “pour un porte-conteneur ça représente sept à dix jours de plus de navigation, donc plus de pétrole, plus de frais d’équipage”, note le Professeur Beurier.

Les pirates pèsent aussi lourd sur les budgets des pays qui ont mobilisé des navires de guerre pour sécuriser le trafic maritime. L’opération navale européenne Atalante représente ainsi de l’ordre de 230 millions d’euros par an, selon les chiffres publiés à Nantes.

Les attaques impactent aussi sur la vie des marchés: la capture du superpétrolier saoudien Sirius Star en novembre 2008 a ainsi engendré une augmentation du prix du pétrole brut de 1,4%, selon l’OTAN.

Le panier de la ménagère souffre aussi car “si le coût des transports augmente, le prix des marchandises augmente aussi dans les grandes surfaces”, notamment pour les produits en provenance d’Asie, selon Vincent Groizeleau, rédacteur en chef du site spécialisé Meretmarine.com.

Nantes, 23 oct 2009 (AFP)

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