Dossier : Santé et prévoyance, les grands chantiers de 2013

    ANI, dépassements d’honoraires, réseaux de soins, maîtrise des restes à charge, le marché de la santé connait une grosse mutation. Tout comme le marché de la prévoyance qui a été bousculé ces dernières années par l’apparition de nouveaux risques et l’allongement du temps de travail dû à la réforme des retraites.

    Faites vos jeux, rien ne va plus. Comme au casino, pour certains acteurs de l’assurance, les mutations des marchés de la santé et de la prévoyance c’est un peu quitte ou double. Alors que l’année 2012 laissait présager un cru 2013 encadré, les espoirs se sont vite envolés.

    Des dépassements d’honoraires toujours pas encadrés

    En octobre 2012, on nous a rabattu les oreilles avec « l’historique » (comme certains l’appelait) accord sur les dépassements d’honoraires qui visait à limiter les tarifs des médecins à 150 % du tarif Sécu. Cinq mois après les assureurs et les assurés non toujours rien vu. Lobbying de grands médecins oblige, plusieurs groupuscules se sont arrangés pour corseter le débat et faire de la mise en place des “sanctions” envers les médecins les plus gourmands, un véritable casse tête. Aujourd’hui la Sécu, l’Unocam et les syndicats de médecins ne sont plus sur la même longueur d’onde. Et il est question de revoir par région le taux de dépassements par rapport au tarif Sécu le plus adéquate. Casse-tête, on vous dit.

    Un Code de la mutualité inchangé

    Fin 2012 aussi, les mutuelles ont sauté de joie lorsqu’une proposition de loi PS visait à modifier le Code de la mutualité pour leur donner le droit, comme pour les IP et les assureurs, de conventionner avec des réseaux de soins… 2013 a pointé le bout de son nez, et à l’heure où nous allons fêter le printemps, toujours pas de modification du fameux code. Lobbying encore des grands notables professionnels de santé (opticiens,audioprothésistes) qui ne voient pas d’un bon œil ou n’entendent pas de cette oreille rogner sur leur marge.

    Toujours en santé, lors du Congrès de la Mutualité, François Hollande, tout juste investi, avait promis de se pencher sur le contrat responsable…  “Le contrat responsable va être discuté au mois de juin“, explique Nicolas Le Berrigaud, leader santé chez Optimind Winter. “Si les dépassements d’honoraires des médecins sont encadrés d’ici l’ouverture des négociations sur le contrat responsable, le nouveau contrat responsable et solidaire l’intégrera forcément. Aujourd’hui tout le monde se concentre sur l’ANI qui a mis un bon coup de pied dans la fourmilière. On attend surtout de savoir ce que sera le panier de soins minimum proposé par l’ANI”.

    ANI sous le feu des projecteurs

    L’ANI ( qui vise à donner à tous les salariés une complémentaire santé d’entreprise), on ne parle que de ça depuis le 11 janvier dernier, date à laquelle l’accord national interprofessionnel a été conclu entre patronat et syndicats. Oui, mais voilà, entre temps il y a eu des chamboulements. Alors que l’ANI, texte originel, prônait une libre concurrence des organismes assureurs et un libre choix des entreprises pour leur couverture, le gouvernement avait fait réapparaître les désignations de branches dans le texte qui sera présenté à l’Assemblée nationale le 2 avril… Au grand dam des mutuelles et assureurs. De fait, l’Apac, la FFSA, le Medef et les petites et moyennes mutuelles sont parties en guerre contre l’artcile 1 de l’ANI en criant au meurtre du jeu de la libre concurrence et en s’attaquant au financement des groupes paritaires. Les branches étant paritaires, les IP aussi, tout ce petit monde se demande si les copains de paritarisme ne vont s’attribuer le marché de la santé collective et créer, de fait, un monopole. Le bonheur des uns, fait donc le malheur des autres et les IP, elles, se défendent en disant “que le meilleur gagne”.

    La prévoyance sous l’impulsion de la réforme des retraites

    Du côté de la prévoyance (obsèques, dépendance, Madelin, Garantie des accidents de la vie, CMU complémentaire), si le marché se fait moins houleux, il n’en a pas été pour autant d’un calme plat. Pour Dinis Pires, manager en protection sociale chez Optimind Winter, “il va falloir attendre ce qui va se passer au niveau de la retraite, le gouvernement parle d’une nouvelle réforme, il va falloir voir quel va en être l’impact et quel sera l’allongement qui va être donné au temps de travail. Si allongement il y a, les cotisations de l’invalidité et de l’incapacité risque d’être également allongées”.

    Philippe Tremoureux, directeur marché des entreprises chez Humanis (premier acteur en santé collective avec 1,5Md de cotisations gérées et 700M d’euros en prévoyance) explique, de son côté, “La prévoyance a été bien chahutée depuis quelques années avec le renchérissement, d’une manière générale, pour les entreprises, des régimes de prévoyance lié à d’une part une évolution de la sinistralité et d’autre part l’impact de la réforme de la retraite. Il faut stabiliser le marché et consolider les équilibres. Il faut faire comprendre aux entreprises ce qu’est le vrai prix de la prévoyance. Les enjeux pour nous, sont désormais sur les services aux entreprises et sur les actions de prévention, de dépistage, d’accompagnement des entreprises sur la santé au travail et l’efficacité économique liéee au bien être au travail“.

    Chez Prévoir, on attend un resserrement du marché de la prévoyance individuelle et une concurrence accrue du fait des difficultés que va engendrer l’ANI sur le secteur de la santé individuelle. “Il va y avoir une montée en puissance des bancassureurs sur ce créneau. C’est un marché aussi difficile à appréhender car il va y avoir un arbitrage des budgets au sein des ménages, du fait de la diminution du pouvoir d’achat,” indique Stéphane Daugeron, directeur Marketing Adjoint du Groupe Prévoir. Autre facteur à prendre en compte sur la prévoyance individuelle, la naissance des nouveaux risques comme les aidants ou les maladies graves qui se développent de plus en plus et qui nécessitent une plus grosse couverture que celui de la Sécu.

    Dans l’avenir : “Le défi de l’assurance prévoyance est qu’il faudra mixer les produits d’épargne et de prévoyance. Cela permettra aux Français de récupérer une partie de leur prime en cas de non survenance du risque à un terme donné, comme sur la dépendance ou le décès. Les risques longs sont excédentaires donc il faudra trouver une solution pour partager les bénéfices techniques pour lever réticences habituelles des souscripteurs., Olivier Arroua, Associé du cabinet Selenis.

    Malgré de nombreux chahuts, l’assurance santé reste en progression en termes de chiffre d’affaires. Le marché représente environ 30Mds d’euros avec une répartition de 55% en individuel et de 45% en collectif. Selon la FFSA, “dans le domaine de l’assurance santé,  le CA a progressé de 5%, à 18,3Mds d’euros. Les dépenses des assureurs santé continuent également à croître (+ 3% entre 2011 et 2012)”. Du côté de la prévoyance les contrats obsèques en 2011 étaient au nombre de 3M soit plus de 7% en un an, la dépendance comptait 1,5M de personnes couvertes (+6% en un an), les contrats GAV, 3,7M (en hausse de 8%) et les contrats CMU complémentaire ont augmenté de 12%.

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