Dossier : L’entrée en fiscalité des mutuelles, la révolution est en marche

    Le fonctionnement comptable des mutuelles est mis à rude épreuve avec leur entrée en fiscalité progressive d’ici à 2015. En payant dorénavant l’impôt sur les sociétés, les mutuelles sont confrontées à un changement de culture qu’elles ne voient pas d’un bon oeil.

    La fiscalisation des mutuelles voulue par la Commission européenne se fait de manière progressive mais pour beaucoup de mutualistes la pilule est dure à avaler. En effet, si les mutuelles du Livre III ont négocié leur entrée en fiscalité progressive pour une adaptation en douceur et une certaine limitation de la hausse des primes, c’est tout un modèle économique et comptable qu’elles doivent repenser.

    Oliver Arroua, associé du cabinet Selenis, explique : “c’est un sujet très compliqué, elle entre dans le droit commun sur l’imposition des sociétés avec une mise en route progressive du paiement, 2013, 2014, 2015, à hauteur de 40% pour la première année, puis de 60% et enfin 100%. Pour moi, cette entrée en fiscalité aura pour effet de réduire les fonds propres, donc, de limiter leur capacité d’investissement”. Autre dégât collatéral à prendre en compte, les inspecteurs du fisc pourront opérer des vérifications au niveau des provisions déclarées. “Quand vous n’êtes pas fiscalisé, la provision est de nature comptable, poursuit Olivier Arroua. Quand vous êtes fiscalisé et si vous avez un excédent de provisions, cela veut dire que vous avez échappé volontairement à l’impôt donc, dans ce cas-là, il peu y avoir des redressements. Ils peuvent coûter plusieurs millions d’euros.”

    Impôt sur les sociétés, les mutualistes en colère

    Beaucoup de mutualistes vivent très mal ces nouvelles règles du jeu et ne comprennent pas pourquoi en tant qu’association à but non lucratif et donc ne générant pas de bénéfices les mutuelles devraient payer cet impôt comme toutes sociétés capitalistiques.

    Philippe Mixe, président de la Fnim, est plutôt remonté. «  On nous explique que c’est normal que nous payons cet impôt puisque nous faisons de l’assurance.  Oui mais encore une fois, le mouvement mutualiste se trouve emporté dans la mouvance assurantielle de l’économie capitalistique contre laquelle je n’ai rien mais ne nous mélangeons pas… Nous ne faisons pas le même métier ou en tout cas nous ne le faisons pas de la même manière”.

    Oeuvres sociales, ça coince

    De plus, pour les mutuelles qui ont des œuvres sociales et qui jusqu’à présent épongeaient les déficits de ces entités avec les excédents qu’elles généraient en santé, ne pourront plus se livrer à cette méthode de financement.  « Demain, les mutuelles ne pourront donc plus financer leurs oeuvres sociales de cette manière puisque les œuvres sociales sont des entités non fiscalisées alors que les mutuelles le sont dorénavant, explique Olivier Arroua.  Le transfert de l’un vers l’autre doit obéir à un certain nombre de règles très complexes pour s’assurer que l’adhérent n’est pas lésé et que l’Etat non plus. »

    Comme tout bon citoyen, les mutuelles ne voient pas d’un bon oeil la multiplication de l’impôt. Mais au final, qui est le vrai perdant?  “Cette entrée en fiscalité est une charge supplémentaire pour les adhérents des mutuelles”, Jean-Martin Cohen Solal, directeur général de la Mutualité française. Voilà qui est dit!

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