Dossier : Le risque fournisseur, risque de l’année 2011 ?

    Dans le domaine des grands risques, l’année 2011 a sans nul doute marqué un tournant. Officiellement baptisée « pire année en coût cat’ nat’ » – avec un montant de 108Mds de dollars de pertes assurables selon Swiss Re – par les réassureurs, 2011 a montré d’autres limites à l’assurance et d’autres enjeux à prendre en compte.

    Le problème de « supply chain », la chaîne logistique ou la chaîne clients-fournisseurs, en langage moins international, aura ainsi déstabilisé une bonne partie de l’économie mondiale sans pour autant se révéler dans les comptes des assureurs. Ces pertes économiques, moins assurées, dont la traçabilité est toujours très difficile, se sont révélées terribles et engagent une nouvelle définition des risques.

    « Les risques managers doivent maintenant se poser de nouvelles question » confie Thierry Van Santen, lors d’un point presse de présentation des résultats d’Allianz Global coporate and specialy dont il est le directeur général de la filiale française.
    Ancien Risk Manager lui-même, il continue sur sa vision d’un risque compliqué. « La sophistication empêche le cumul des fabricants. Il est impossible d’assurer toute la chaîne, le risque est trop élevé » et, sous-entendu, les capacités à mettre en face trop importantes.

    La mondialisation qui règne maintenant au niveau économique pour les grandes entreprises, et de plus en plus pour des entreprises de taille intermédiaire, intensifie les risques sur la chaîne logistique, chaîne d’approvisionnement, ou les risques des carences fournisseurs selon le terme que vous aurez choisi.

    Lorsque la zone de Fukushima est touchée par le séisme et le tsunami, qu’elle est évacuée pour le risque nucléaire, toute l’économie de la région s’arrête. Et avec elle, toutes les économies qui dépendent du travail de cette région ralentit. Et quand la « base arrière » du Japon, la Thaïlande, est frappée d’inondations, c’est le monde entier qui vacille…

    2011 a-t-elle révélé un risque inconnu ? Oui et non, répondent en cœur entreprises, assureurs et courtiers. « Dans un domaine comme le dommages que tout le monde pensait complètement connaître (…) le Japon a montré que tout ce qui est contengcy business interruption (CBI) au niveau mondial fait voir la connectivité en terme absolu du monde industriel et commercial » relève Jeff Moghrabi, directeur général de ACE Europe, lors des Rencontres Amrae 2012.

    Pour Julien Camus, président de la commission Entreprise risk management de l’Amrae, « ce fut une vraie prise de conscience » en 2011. Surtout, les grands groupes doivent maintenant éduquer, d’une certaine façon, leurs fournisseurs à la gestion des risques. Pour mieux maîtriser des risques qui seront difficilement assurables, il devient fondamental de retrouver une niveau d’information à la hauteur des enjeux.

    « Peu d’entreprises achètent réellement des couvertures en business interruption (BI) actuellement » révèle, sous couvert d’anonymat, un autre risk manager d’une grande entreprise française. « Nous n’avons pas l’habitude de le faire, je ne peux même pas vous dire si quelqu’un propose des polices répondant aux besoins, je n’y fais pas attention » ajoute-t-il.

    Y’a-t-il réellement un marché pour ce risque, dès lors que beaucoup d’entreprises feraient le choix d’une auto-assurance et d’une gestion des risques fournisseurs beaucoup plus pointue ?
    « C’est vrai que les carences de fournisseurs sont cumulatives par nature, sont extrêmement toxiques si elles ne sont pas maîtrisées par le secteur » détaillait Philippe Jouvelot lors des Rencontres Amrae. « C’est un besoin légitime de nos clients, mais cette garantie d’assurance doit venir après le risk management, c’est à dire après toutes les mesures qui ont pu être prises pour mettre l’entreprise en situation de ne pas avoir un seul fournisseur au moment où il aurait une indisponibilité » ajoute-t-il.
    Dès lors, la balle semble être dans le camp des risks managers. Mais les assureurs fourbissent leurs armes, pour le moment dans un assez grand secret, afin de propose dans le courant de l’année des polices plus précises et plus adaptées aux risques de carences fournisseurs. Un renouveau donc, dans la couverture de la supply chain.

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