Dossier « Pub » : Quand l’assurance envahit les écrans

    Depuis une dizaine d’années, le secteur de l’assurance se fait de plus en plus présent médiatiquement, dans des campagnes publicitaires nombreuses sur les médias de première importance. Entre stratégie produit et communication plus institutionnelle, chacun tente de trouver sa place dans un paysage médiatique devenu un nouvel enjeu concurrentiel.

    Le mois de septembre 2009 a été marqué par la présence importante des assureurs… à la télévision. Sponsoring de la météo, programmes courts sur les chaînes généralistes, campagnes produits à la radio, communication institutionnelle sur le changement de nom et présence sur les chaînes thématiques d’information ont montré une dizaine de marques simultanément aux Français.

    Le phénomène semble s’intensifier. « Je crois qu’il y a une évolution sensible du secteur. La prise de conscience date de quelques années. Les assureurs ont compris la nécessité de faire émerger leurs différences. Ce n’était pas historiquement dans l’esprit des assureurs » explique Jean-Luc Gambey, consultant en communication et fondateur de Molitor Consult.

    Et le phénomène s’est répandu, étendu au secteur dans un effet boule de neige. « Il y a réellement un effet d’entraînement dans le milieu car les concurrents se sont crus obligés de répondre et de faire pareil, voire mieux » appuie Cyrille Chartier-Kastler, fondateur du cabinet de consulting Facts and Figures.

    De fait, tous les acteurs communiquent, même sur les grands médias tels que la télévision. De l’assureur « international » à l’institution de prévoyance plus locale, chacun a développé ses budgets de communication. Ils atteignent aujourd’hui plusieurs dizaines de millions d’euros par an pour les plus importants.

    Effet d’entraînement

    « Depuis une dizaine d’années, l’assurance est passée dans une stratégie de communication agressive. Tout le marché a augmenté ses budgets de l’ordre de 30 à 60 millions d’euros en moyenne » ajoute Cyrille Chartier-Kastler. De fait, les chiffres sont toujours secrets et ne sont dévoilés que lorsque les campagnes sont terminées.

    « Nous ne dévoilons pas notre budget, qui est adaptable en fonction de ce que ferons nos concurrents. Notre objectif est de nous installer durablement parmi les assureurs les plus communicants dans les grands médias » révélait ainsi Jacques Richier lors de la présentation de la marque Allianz en septembre dernier.

    Car de nos jours, la politique de communication devient surtout un moyen d’exister aux yeux des clients, et de ne pas voir les autres passer devant en terme de notoriété. Car c’est bel et bien la notoriété qui est mise en avant, plus que les produits, l’assurance ne répondant pas à une mécanique d’achat impulsif.

    Pour les deux consultants, il existe différents types de communication. Cyrille Chartier-Kastler détaille ainsi « une communication coporate, sur la marque, qui permet d’affirmer une promesse au client final. Il existe une communication produit, poussée par la crise, sur des offres très segmentées. Enfin, il est possible de communiquer sur les ‘packages’ mais c’est moins courant maintenant. »

    Plus de communication « corporate » que « produit »

    De son côté, Jean-Luc Gambey note que la communication sur le nom a pris le pas, pour des raisons propres à l’évolution du secteur ces dernières années. « Les regroupements, par exemple, ont fait émerger de nouvelles marques. Les campagnes institutionnelles deviennent inévitables. La Mutuelle Générale, qui s’appelait MG, communique depuis plus d’un an pour faire émerger cette nouvelle identité. Il faut exister en terme de marque, dans l’inconscient des consommateurs. Il faut donc répéter massivement les messages pour créer l’automatisme. »

    Les stratégies et les moyens employés sont divers. Présence de personnalités connues et reconnues, anonymat associé à une phrase choque, utilisation de standards télévisés ou communication centrée sur une musique qui devient identitaire, chacun tente de se démarquer et de se montrer.

    Faut-il y voir une certaine surenchère ? « J’ai l’impression que les assureurs se disent plutôt : ‘quel est l’investissement nécessaire pour exister ?’ Ce n’est pas une surenchère médiatique mais je pense qu’il y a un ticket d’entrée nécessaire pour exister » estime Jean-Luc Gambey. « Je pense qu’il y a la nécessité pour un assureur grand public de se positionner. C’est incontournable. Quand on voit des acteurs de taille ‘moyenne’ comme Apicil, que le grand public ne connaît pas beaucoup, sponsoriser la météo, c’est un signe. »

    Surenchère ou pas, finalement, la machine est lancée et ne semble pas prête de s’arrêter.
    « Le secteur ne peut plus revenir en arrière, il est allé trop loin. Ça peut-être un problème, car l’assurance a un enjeu social et est considéré comme un produit de consommation courante, banalisé et galvaudé. L’assurance touche à la vie des personnes, à leurs protection. Par exemple, la protection du conducteur sur les contrats auto, qui n’est pas systématiquement intégrée pour réduire le prix. La promotion sur l’aspect prix dépouille les offres de garanties essentielles » relève Cyrille Chartier-Kastler.

    L’assurance renvoyée au rang de produit de consommation courante, c’est également le signe que les assureurs ont désacralisé les produits pour s’approcher au plus près des prospects et des clients.

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