Des cultures d’entreprise très fortes dans l’assurance

    « Avoir l’esprit corporate ». Si l’une des forces du secteur de l’assurance c’est la mise en avant de valeurs propres à chaque organisation, la politique d’intégration vis-à-vis de ses salariés pèche encore.

    Facteur de cohésion interne autant que de différenciation externe, l’esprit « corpo » a son importance dans le petit monde de l’assurance. « C’est une spécificité de la France, nous sommes un pays de chapelles.  Si l’assurance peut paraitre un métier homogène, on a en réalité des cultures d’entreprise très différentes » déclare Dominique Bienfait, du cabinet Bienfait et Associés. Compagnies, cabinets de courtage, mutuelles du Gema ou mutuelles 45, institutions de retraite et prévoyance, autant d’organisations qui ont une histoire, des codes et des vocations différentes, chaque nom se distinguant de ses confrères par une éthique professionnelle différente. Si la connaissance du métier est fondamentale, il s’agit aussi de cultures spécifiques auxquelles un nouvel entrant doit avoir la capacité de s’adapter.

    Il y a deux ans, l’ANDRH, l’Association nationale des directeurs de ressources humaines, publiait un rapport selon lequel une intégration sur quatre échouait, soit parce que l’entreprise n’était pas assez vigilante sur le parcours d’intégration soit parce que le candidat n’avait pas compris la culture d’entreprise. Dans un secteur de plus en plus concurrentiel, on comprend l’importance de la valeur d’entreprise et donc de l’adhésion de ses salariés par l’intermédiaire d’une politique d’intégration au sein des entreprises.  Et l’identification à des valeurs est un courant de société qui se retrouve dans l’emploi, important pour le salarié, pour qui le travail en entreprise, au-delà de la rémunération, permet une projection au sein d’un projet commun.

    « On observe un fort attachement des personnes à la marque pour laquelle elles travaillent. Bien que cela dépende des structures, le point fort des assureurs est le message de l’employeur vis-à-vis des salariés qui est fédérateur. Les salariés sont fiers de travailler pour des entreprises qui ont pour objectif de protéger des gens, une vocation sociale ou de couverture » remarque Mathieu Motillon du cabinet de recrutement W Human resources. Le secteur fédère aussi par l’intermédiaire de conventions collectives qui restent très protectrices vis-à-vis de ses salariés.

    Et l’importance accordée à la formation professionnelle continue des salariés participe fortement à cette perspective d’évolution au sein d’une même entreprise

    Les chiffres des évolutions internes – 75% des cas, plutôt que des recrutements externes participe également à la volonté d’appartenance aux entreprises du secteur. Et l’importance accordée à la formation professionnelle continue des salariés participe fortement à cette perspective d’évolution au sein d’une même entreprise. Alors que légalement, les entreprises doivent consacrer 1,6% de leur masse salariale à la formation continue de leurs salariés, le secteur de l’assurance se situe toujours entre 4,5 et 4,8%. « Si les entreprises d’assurance investissent 3 fois plus que l’obligation légale, c’est parce qu’elles considèrent que c’est leur intérêt pour améliorer leur qualité de service et parce que ce sont aussi des possibilités de carrière au sein de entreprise qui sont proposées » selon Norbert Girard, chargé de mission à l’Observatoire des métiers de l’assurance.

    Traditionnellement, l’assurance a toujours pratiqué une forme d’ouverture vis-vis des profils sélectionnés, permise par de nombreuses académies internes, des formations aux différents métiers par les entreprises elles-mêmes. Parfois même des formations diplômantes externes mais en relation avec l’entreprise comme avec le CHEA, le Centre de hautes études en assurances ou l’ENASS, l’Ecole nationale d’assurances dans le cadre du Cnam. Mais paradoxalement,  plus les entreprises sont petites, moins les cursus d’intégration sont bien conçus. Un accompagnement au sein de l’entreprise qui pèche encore dans les organisations du secteur : « Les petites entreprises ont encore des efforts à faire dans les cursus d’intégration : l’accompagnement des salariés à leur entrée dans l’entreprise est un point faible » souligne Dominique Bienfait. C’est moins le modèle d’organisation que l’accompagnement du nouvel entrant qui est pointé du doigt.

    Un monde qui reste également ouvert car l’assurance est un univers pour lequel toutes les statistiques du secteur sont rassemblées par l’intermédiaire de l’Observatoire des métiers de l’assurance. Une connaissance  de la population permettant d’adopter des politiques volontaristes : « Alors qu’il y a 7 ou 8 ans, l’âge de départ moyen à la retraite était de 54 ans pour les femmes et 57 pour les hommes, on est passé à 60 pour les deux sexes» remarque M. Bienfait. L’Observatoire est même parvenu à bâtir des prévisions sur les départs à la retraites à échéance 2025. Dans les politiques mises en place par les entreprises, toutes les catégories ne sont néanmoins pas sur un pied d’égalité. Les femmes et les séniors font encore plus souvent l’objet de communication de la part des entreprises que de véritables politiques efficaces, puisque ce sont des populations sur lesquelles les chiffres bougent encore peu.

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