Avec Solvabilité II, pourquoi choisir la réassurance comme source de capital ?

    La réassurance dite traditionnelle peut à la fois jouer un rôle de protection du bilan et du résultat de la cédante et soutenir une stratégie préalablement définie en se substituant au capital. Quels sont les avantages de la réassurance face aux autres sources de financement ?

    La crise financière de 2007-2010 puis les incertitudes liées à l’endettement au sein de la zone euro ont rappelé, y compris pour les assureurs, que les marchés financiers présentaient d’importants risques de volatilité, comme l’illustre la Figure 1.

    Dans ce contexte, la réassurance est de plus en plus reconnue comme une source de financement alternative ou complémentaire aux marchés financiers, permettant de sécuriser le coût d’accès au capital sur un horizon donné.

    A côté des modes traditionnels d’accès aux capitaux, par augmentation de capital ou par émission d’emprunt subordonné par exemple, la réassurance a toute sa place et doit être mise en regard car elle présente en effet d’autres avantages propres comme le transfert de risque ou l’accès à des services et à l’expertise technique du réassureur.

    Une grille d’analyse comparative entre trois sources de capital est proposée en Figure 2.

    Ce regain d’intérêt pour la réassurance, comme source de financement alternative, est lié à la crise financière mais s’explique aussi par les contraintes qui sont associées à la directive européenne Solvabilité II. Cette directive encourage les assureurs à mieux analyser l’ensemble des risques en lien avec leur activité et à évaluer leur besoin en fonds propres de manière économique. Ce nouveau cadre réglementaire incite à une gestion plus fine des sources de capital.

    Le cœur de l’activité de réassurance réside dans le transfert de risque

    L’assureur réduit son exposition au risque en transférant une partie de celui-ci à son réassureur. Cela revient pour la cédante à demander au réassureur de lui « prêter » des fonds propres contre rémunération. Ce transfert de risque s’opère en échange d’un risque de contrepartie puisque le capital qui vient s’adosser au risque ne se situe pas physiquement chez l’assureur mais chez le réassureur.

    Une différence fondamentale entre la réassurance et les autres sources de capital réside dans le fait qu’avec la réassurance, ce capital est « reconstituable » pour la cédante. En effet, en cas de levée de fonds propres sur les marchés de capitaux, un scenario d’hyper-sinistralité peut consommer une partie des fonds levés. Le risque de contrepartie se situe alors chez les investisseurs ou les prêteurs. Dans le cas de la réassurance, cela reste en règle générale sans conséquence sur le niveau des fonds propres de la Cédante car lorsque le réassureur règle des sinistres au-delà du montant attendu, ce sont principalement les fonds propres du réassureur qui sont mis à contribution.

    L’exemple d’un portefeuille de prévoyance collective réassuré par un XS tête puis par un stop-loss est illustré par la Figure 3a.

    On voit dans cet exemple que l’effet de la réassurance complémentaire en stop-loss est plus puissant que celui de la dette subordonnée puisqu’elle permet d’atteindre un ratio de solvabilité plus élevé. Les conséquences d’un événement pandémique correspondant à une surmortalité de 1,5 pour mille des capitaux sous risques (choc SCR Cat Vie de solvabilité II) peuvent s’observer sur la Figure 3b. La réassurance en stop-loss apparaît encore plus efficace que la dette subordonnée dans ce contexte.

    S’ajoute à cela le fait que la taille du bilan augmente avec l’emprunt subordonné conduisant ainsi à un risque de marché accru. Ceci se traduit par des coûts en capital additionnels (non illustrés dans le schéma).

    Comment comparer les coûts de la réassurance et d’un financement traditionnel ?

    Afin de mesurer l’intérêt de la réassurance par rapport aux formes plus classiques d’accès au capital (actions, emprunts subordonnés), il est nécessaire de comparer leurs coûts respectifs et de s’intéresser à ce à quoi ils correspondent.

    Le capital financier alloué à un risque a un coût : un actionnaire s’attend à recevoir un dividende et le détenteur d’une obligation à des intérêts. Le coût des actions dépend des exigences des actionnaires quant à la rentabilité de l’entreprise. Le coût des emprunts subordonnés dépend à la fois du rating, de la qualité de la dette et des conditions de marché.

    La réassurance possède, elle aussi, un coût. En effet, elle consiste en un transfert de risque auquel s’ajoute la nécessité de rémunérer le capital alloué au risque transféré. Ce coût implique mécaniquement la réduction du montant de la marge de l’assureur.

    Une métrique pour évaluer le coût de la réassurance

    Le coût de la réassurance correspond aux bénéfices futurs espérés cédés au réassureur. Afin d’évaluer ce coût il est possible d’utiliser la métrique « PVI/PVC » soit la valeur actualisée des résultats cédés au réassureur divisée par la valeur actuelle des surplus créés avec la réassurance sous Solvabilité II.

    Nous pouvons alors comparer cette métrique à l’objectif de rendement des actionnaires au-dessus du taux sans risque pour les actions ou encore au spread au-dessus du taux sans risque pour les emprunts subordonnés. Par ailleurs, il faudrait ajouter au coût du capital et des emprunts des frais d’émissions qui n’existent pas avec la réassurance.

    Traditionnellement, le coût des titres subordonnés peut fluctuer dans une large mesure pour l’assureur. Plus le risque de perte en capital pour l’investisseur est fort et se confond avec celui que l’on retrouve pour les actions, et plus les taux demandés par les investisseurs sont élevés. Par ailleurs, ces taux, comme nous l’avons vu, sont susceptibles de présenter une forte volatilité selon les conditions des marchés financiers.

    Le coût de la réassurance peut dans de nombreux cas s’avérer plus compétitif. Des éléments de calcul de la métrique PVI/PVC sont proposés dans la Figure 4. Le choix de la meilleure solution dépend du portefeuille de l’assureur, de la structure du traité, des conditions de la réassurance, du SCR économisé avec la réassurance sous Solvabilité II et du prix des emprunts subordonnés que l’on peut trouver sur le marché.

    Une grande flexibilité

    Enfin et surtout, la solution de réassurance offre une grande souplesse à la cédante qui peut établir une stratégie taillée sur mesure à ses besoins en capitaux, alors que les emprunts subordonnés obéissent à des règles strictes (pour la classification en tiers 1, 2 ou 3 par exemple) et que l’accès aux marchés financiers est plus complexe que la mise en place d’un traité de réassurance.

    La réassurance s’adapte plus facilement dans le temps aux besoins de capital contrairement aux actions et obligations : chaque risque peut être géré sur son horizon particulier et le montant de la cession peut être ajusté sur mesure, en fonction de l’exposition du portefeuille. La réassurance s’adapte également au cours du temps aux besoins ponctuels de protéger les comptes de résultats ou de limiter la volatilité du SCR.

    La réassurance peut être vue comme une source de diversification des sources de capital, en complément ou en substitution des sources habituelles. Autant de raisons pour comparer la réassurance avec les autres sources de capital lorsque l’on cherche à augmenter ses fonds propres.

    Une nécessaire coordination entre les services

    La comparaison du coût des différentes sources de capital, comme la réassurance et les emprunts subordonnés, nécessite l’implication des départements actuariat et finance, plus ou moins distincts dans l’entreprise d’assurance.

    Par ailleurs, les impacts d’un transfert de risque par la réassurance sont transverses. Au-delà des aspects purement financiers, un transfert de risque peut impacter les services de gestion ou de souscription de la cédante. C’est en s’attachant à cette vision globale de l’activité de l’entreprise que la fonction gestion des risques et la fonction actuarielle définies dans solvabilité II définissent et mettent en œuvre la politique de réassurance et participent à la gestion des sources de capital.

    La réassurance et les autres sources de fonds propres sont des éléments constitutifs du besoin global de solvabilité de l’assureur. Celui-ci est défini dans l’ORSA (Own Risk Solvency Assessment de Solvabilité II) comme l’ensemble des moyens dont dispose l’entreprise pour couvrir de façon permanente et prospective les exigences de capital. En effectuant ses analyses ORSA, l’assureur peut effectuer une comparaison globale entre les différentes sources de capital et mettre en avant les multiples avantages de la réassurance.

    La solution retenue, qui peut être hybride, résulte des arbitrages réalisés par l’assureur en lien avec sa politique de gestion des risques. La qualité des travaux menés repose sur une bonne coordination entre les différents services mais aussi sur une bonne coordination avec le réassureur.

    Conclusion

    La réassurance joue un véritable rôle de stabilisateur des fonds propres dans le temps. Elle permet en effet de protéger dans le même temps le compte de résultat et le ratio de solvabilité.

    En complément, le réassureur apporte également des services pouvant s’inscrire aussi bien dans la définition de l’appétence aux risques de sa cédante que dans des choix de produits en ligne avec les contraintes de gestion.

    Le réassureur peut ainsi devenir un partenaire dans le cadre d’un développement commercial, d’un rapprochement stratégique ou d’un repositionnement sur un marché tout en permettant l’optimisation de la gestion des fonds propres à travers la diversification des sources de capital.

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    Afin d’obtenir plus de précision pour savoir comment utiliser l’ORSA dans le cadre de Solvabilité II, n’hésitez pas à regarder notre vidéo « Comment utiliser la réassurance dans le cadre de l’ORSA et de Solvabilité II ? ».

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