Dossier : L’ANI va-t-il précipiter la disparition des mutuelles ?

    Pas facile de faire face à un marché santé collectif grandissant lorsque l’on est une mutuelle, spécialisée sur l’individuel. Pour palier à la crise à venir, les petites et moyennes mutuelles ont deux solutions : se regrouper et conserver leur spécificité.

    Généraliser la complémentaire santé pour tous les salariés, c’est bien, mais l’inversion du marché santé à venir (le collectif prendra le pas sur l’individuel) ne laisse rien présager de bon pour les petites et moyennes mutuelles.

    Rester sur les marchés de niche

    En effet, beaucoup de mutuelles sont, essentiellement, axées sur la santé individuelle. De fait, lorsque tous les salariés seront couverts par un contrat collectif obligatoire, ils seront obligés de résilier leur contrat individuel. Un bouleversement que les petites mutuelles ne supporteront sans doute pas. “Il va y avoir des tensions très fortes. Les petits acteurs qui ne sont pas sur des niches, vont être en grande difficulté”, explique Olivier Arroua, associé de Selenis. Première solution pour survivre, le regroupement. “C’est avantageux si les mutuelles proposent une offre commune en vue des accords de branches. En revanche, elles ont très peu de relais décisionnaires dans les entreprises pour les promouvoir”, poursuit-il.

    Harmonie Mutuelle a trouvé la parade. Récemment, elle a accueilli le groupement Agrume. En recrutant ces 30 mutuelles, le groupe s’assure de mutualiser ses moyens avec d’autres organismes pour être plus fort sur les accords de branches à venir. Humanis, par la voix de Philippe Trémoureux, avoue que “l‘ANI relance l’intérêt de certaines mutuelles pour nous rejoindre ou envisager différentes formes de collaboration“.

    La FFSA rebondit : “On constate depuis plusieurs années un mouvement de concentration des mutuelles. Elles étaient plus de 1.500 en 2001, elles ne sont plus que 560 en 2011. Ce regroupement est principalement dû aux changements réglementaires successifs (code de la mutualité, fiscalité, directive solvabilité II) imposant l’adoption de règles de gouvernance plus contraignantes, et l’application de calculs de besoins de fonds propres plus complexes, obligeant les plus petites mutuelles à se regrouper afin de réaliser des économies d’échelle et mettre en commun leurs moyens notamment en informatique”.

    Bouleversement du business model

    La polémique autour de l’ANI  reste très  concentrée  sur les clauses de désignation ou de recommandation mais le vrai débat est peut être ailleurs. Sur le fond et à terme, cette  réforme aura un impact important sur le marché de la couverture complémentaire  santé.  Le collectif est désormais très nettement mis en avant et cela  va profondément modifier  le business model des mutuelles. Les bancassureurs qui se sont récemment lancés sur le marché vont devoir également repenser leur positionnement, selon Marie-Laure Dreyfuss, directeur de mission, responsable du pôle Gouvernance et Contrôle Interne chez Actuaris.

    Celles qui auront donc un bon réseau, une bonne gestion commerciale et qui garderont leur spécificité réussiront à tirer leur épingle du jeu. Les autres pourraient récupérer les mauvais risques et vont devoir faire face à de vrais déséquilibres au sein de leur équipe techniques. “Les gros acteurs pourraient globalement moins y perdre en tablant sur la  réassurance“, conclut Marie-Laure Dreyfuss.

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